Stupor Mundi
7.7
Stupor Mundi

BD de Néjib (2016)

Les Pouilles. Le châtelain Hermann von Salza, qui attend la visite de l'empereur Barberousse, accueille l'érudit Hannibal Qassim el Battouti, qui a fui Bagdad avec sa fille Houdé, protégée par un garde de la secte des assassins, El Ghoul. Il semble venu avec un projet, fait construire une étrange maison obscure, avec juste une ouverture pour la lumière, et demande d'avoir accès au livre d'un savant arabe spécialiste de la lumière et de la géométrie. Il reçoit un accueil frais du religieux Gattuso, et un accueil faussement chaleureux du peintre Balthazar. Il reste mystérieux sur son projet.


Lorsque Barberousse arrive, Hannibal révèle son dessein. Il peut imprimer le portrait d'une personne éclairée dans la pièce de la maison, grâce à des manipulations chimiques placées sur un linge mouillé. Mais le résultat ne reste pas longtemps à la lumière. Hannibal obtient de Barberousse quelques mois pour résoudre ce problème. Car l'empereur a un plan : utiliser ce procédé pour créer un faux suaire portant l'empreinte du Christ. Pendant ce temps, sa fille Houdé se lie d'amitié avec un archer raté et suit une sorte de psychothérapie auprès d'un savant italien, Fibonacci. C'est l'occasion de comprendre qu'Hannibal avait mené la même expérience à Bagdad et avait dû fuir, accusé de diablerie, non sans avoir perdu sa chère femme.


Le livre avec la formule chimique disparaît momentanément, on découvre que c'est la faute du peintre et du moine Gattuso, hostile à ce nouveau procédé. Hannibal reprend ses essais, alors que le nonce apostolique est venu voir le fameux saint suaire. Ce dernier brûle au bout de quelques minutes : Gattuso avait délibérément altéré la formule pour que le nonce puisse parler de diablerie. Furieux, l'empereur veut tuer Hannibal. El Ghoul est tué dans la bagarre, et Hannibal perd un oeil. Les choses se tassent, Gattuso révèle sa machination, fait pour l'empereur un nouveau suaire stable, après quoi la formule est détruite. Hannibal part avec sa fille, mais lui montre un portrait imprimé de sa mère. Il comprend désormais à quoi sert son invention : à se souvenir de ce qui est beau.


C'est une belle histoire de combat entre la science et la superstition, dans un âge de violence et de fanatisme. La confrontation entre Gattuso et Hannibal est d'ailleurs assez nuancée ("Nous aurions pu nous entendre - En d'autres temps, oui"). A noter dans l'histoire deux références consécutives à Edgar Allan Poe (les singes utilisés pour le vol, la lettre dissimulée), qui arrivent un peu comme un cheveu sur la soupe.


Le graphisme est tout de même un peu simple (la couverture en donne une idée). Les décors ne sont pas très fouillés (les plans larges sont de simples crayonnés ancrés), certains passages sont un peu schématiques, pour une époque qui était pourtant d'un foisonnement et d'une richesse qui aurait pu faire espérer un traitement plus fouillé.


Cette réserve mis à part, c'est un bon livre. Je ne l'aurais pas acheté, c'est tout. L'avoir lu en emprunt de bibliothèque me suffit.

zardoz6704
7
Écrit par

Créée

le 17 déc. 2017

Critique lue 250 fois

zardoz6704

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