Stupor Mundi ou l'art de montrer que les apparences sont trompeuses. En effet, en feuilletant cette bande dessinée on pourra être repoussé par les dessins brouillons... et pourtant sans eux Stupor Mundi ne serait pas aussi percutante. A travers le graphisme simpliste de sa BD, Néjib partage avec nous un univers captivant et débordant d'imagination où chaque case est d'une efficacité qui nous laisse perplexe.
En effet, l'auteur nous propose des cases d'une grande efficacité - efficacité due à une composition extrêmement intelligente. D'ailleurs, la composition m'a tout de suite fait penser à du cinéma - ce qui n'est pas très étonnant étant donné que la bande dessinée ressemble par plusieurs aspects au cinéma notamment à travers le travail de composition. Mais ici on le ressent particulièrement grâce à des "plans larges" du château, des "plans contemplatifs" du ciel et de divers paysages et des "plans serrés" et "très serrés" sur les visages des personnages. Tout ce travail hallucinant sur la composition des images fait que chaque case succède à la précédente de façon fluide et naturelle. Et puis, que dire de ces nombreux "hors-champs"...
Mais si ce n'était que ça ! Il y a aussi l’hétérogénéité des graphismes qui apporte un énorme atout à Stupor Mundi : on se trouvera face à une page entière extrêmement détaillée et trois pages plus tard on sera face à un personnage au milieu d'un fond entièrement blanc. Il n'y aucune limite, aucune règle, rien d'ordonné - Néjib se permet toutes les libertés possibles - et ça fait de cette BD une œuvre pleine de richesses et de surprises.
Il ne faut surtout pas se laisser repousser par la simplicité des dessins qui font paraître le tout un peu brouillon car ces derniers donnent une grande profondeur à l'histoire.
L'histoire est d'ailleurs très prenante, intéressante (et tout à fait probable : en effet, il a manqué peu de choses pour que la photographie soit créée à l'époque de l'Antiquité donc pourquoi pas au Moyen-Age) grâce à un suspense présent tout du long.
De plus, l'auteur, grâce à des jeux d'ombre, de couleur et de lumière instaure une atmosphère pesante et angoissante.
Aux premiers abords l'histoire semble aussi simple que les dessins mais grâce à des questions pertinentes, à des passages haletants, à un enjeu intéressant et à des cases magnifiquement bien composées on ne peut qu'en conclure que Stupor Mundi est une bande dessinée rare et surprenante et qui personnellement m'a beaucoup touché.