Nous avons ici un phénomène intéressant, mais avant tout chose, une petite contextualisation me semble profitable. The Fountain est une histoire écrite par Darren Aronofsky conjointement pour le medium bandes dessinées et le medium film. Ce comics n'est en rien une adaptation du film, mais bien une autre proposition pour une même histoire. Ayant vu le film il y a quelques années, mon expérience de lecture s'est inévitablement faite sur mes souvenirs du film, ces souvenirs étant que l'histoire avait du potentielle mais était trop confuse. Autant dire que mon visionnage du film m'avait laissé un peu perplexe et j'appréhendais un peu le résultat en comics, de peur de retomber sur une histoire confuse.
Mais l'occasion d'acquérir ce beau livre à prix intéressant et devant le traitement graphique qui m'emballait (la couverture est proprement magnifique), je décidais de sauter le pas. Grand bien m'en fasse, car malgré mes réserves, j'en ai réellement apprécier la lecture ! Bon mais ça, ma note suffisait à le dire.
Tout d'abord, d'un point de vue de pure comparaison avec mon expérience cinématographique, voilà comment je décrypte cette différence d'appréciation : le temps de lecture. Contrairement au film où le spectateur subit la temporalité du réalisateur, ici le lecteur a tout le loisir pour lire à son rythme et prendre le temps qu'il lui faut pour intégrer les enjeux de l'histoire. C'est d'autan plus appréciable que l'histoire éclate également la temporalité classique en proposant 3 époques où les personnages, les enjeux et les dénouement vont se télescoper. Avec le média BD, le lecteur intègre mieux ce concept de trois réalités s'influençant l'une l'autre, et bien mieux à même de transporter ce qui lit d'une époque à l'autre, car le temps de digestion est le sien. Il m'apparait aujourd'hui que le film ne réussissait pas dans cette exercice et le spectateur avait bien du mal à prendre l'ampleur de l'histoire qui lui est contée.
Ce phénomène a d'ailleurs été souligné par Alan Moore lorsqu'il dit avoir remarqué être capable de faire passer beaucoup plus d'informations par le média comics que par le média film (au sens d'une histoire plus dense).
Mais si ce n'était que ça, alors The Fountain serait tout de même une déception. Mais il y a une vrai intelligence dans la narration graphique. Les différentes époques ont des traitements graphiques différents, appuyant les diverses ambiances. Et cela participe d'autant plus à la transmission des émotions (mention spéciale pour la partie contemporaine), comme on peut le voir dans un Astérios Polyp par exemple. La forme se supplée donc au fond.
Et l'histoire en elle-même en ressort grandie, plus claire et éclatante, qui me fait dire que la narration séquentielle était celle qui lui fallait. J'ai été emporté dans les époques, pris dans la quête ultime de ces personnages contre la mort. Il n'y a pas grand chose à en dire maintenant que j'ai expliqué en quoi tout les artifices artistiques du neuvième art se mette au service de la transmission de cette histoire et des émotions qu'elles transportent. Tout est fait pour toucher le lecteur le efficacement possible.
Voilà, j'ai été conquis et au-delà de l'histoire intéressante, cette objet est une expérience intéressante en parallèle de son frère du septième art.
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