Un départ précipité - Une épatante aventure de Jules, tome 4 par Hypergerme
Elle est quand même forte cette série. Biologie, religion, sciences, éthique, médecine, mythologie, physique, écologie, éducation, politique, les thèmes sérieux abordés y sont nombreux, une manière comme une autre de sensibiliser ou de faire de la vulgarisation à un jeune public assez tôt (même si l'auteur critique pas mal certains travers de l'homme, l'obscurantisme, l’irresponsabilité des adultes face au monde, entre autre...)
Alors que je suis pas loin de penser que cette série est une des meilleurs (si ce n'est la meilleure) série de BD jeunesse, je dois avouer que j'ai été assez sévère avec les premiers tomes (du moins dans ma note) : la raison est simple. Cette série, malgré ses qualités intrinsèques indéniables est quand même extrêmement ambitieuse, voire prétentieuse (dans le bon sens du terme), et n'était, pour moi, pas toujours apte à remplir ses prétentions (par exemple, dans le premier tome, la série se voulait être une série de SF jeunesse, sérieuse et consciente de l'impact des personnages sur les environnements, mais un des aliens était attaqués de façon totalement gratuite). Mais ici, il n'y a aucun faux pas, tout est intelligemment pensé, écrit et construit pour que cet album soit lisible et apprécié autant par les enfants (ce qui facilitera je pense un hypothétique dialogue avec les parents) que les adultes.
En effet, ici, Jules est confronté à la mort. S'ensuit tout un questionnement sur la médecine, l'éthique de la recherche scientifique. C'est costaud pour une série jeunesse. Mais quand en plus, plus loin, les amis de Jules comparent celui-ci à Orphée et que la BD touche à la question de la mythologie, à grand coup de métaphore par rapport au mythe, je jubile. En effet, la mythologie grecque c'est mon péché mignon, et comme le récit d'Emile Bravo est très bien écrit, toutes les pistes de réflexions s'enchainent à merveille, sans que jamais rien ne soit trop complexe ou abscons (du moins pour moi, mais je ne pense pas que ça soit trop dur pour un enfant). Le seule passage que je n'ai pas compris et dont j'aurai aimé pouvoir lire plus d'informations, c'est lorsque l'alien aborde (enfin "frôle" plutôt car ce point est très peu développé) la question d'(augmenter) l'espérance de vie des humains.
En plus, Emile Bravo prend beaucoup de risques ; refaire faire un "saut dans le temps" à Jules à cause d'un voyage dans l'espace à la vitesse de la lumière (et la relativité du temps qui va avec), mais le faire aussi tout doucement entrer dans l'adolescence en le faisant questionner sur sa vie sentimentale, sont de très bonnes trouvailles. Il est aussi sous-entendu que le frère de Jules devient skin-head tout doucement, mais de façon encore subtile. Je trouve que c'est de gros risque que prend E. Bravo mais il s'en sort très bien (quelle bonne idée d'avoir fait de la famille de Jules une famille de français moyen légèrement en dessous de la moyenne).
Drôle, émouvante, très intelligemment et subtilement écrit, éducative, brassant une dizaine de thèmes assez compliqués lorsqu'on a 10 ans, mais aussi assez magnifiquement bien dessinée (dans ce style néo-ligne claire tellement propre et maitrisé de l'auteur) : cette BD est résolument magnifique !