Si la bande-dessinée est l'art de former une suite avec des images, alors je me dois de remarquer la pauvreté des dessins d'Undercurrent. Les cadrages n'ont d'autres intérêt que d'exposer celui qui parle ; trop de cases ne contiennent qu'un fond blanc avec le portrait d'un personnage exprimant son état émotionnel, accolé à de longues bulles de texte. C'est à se demander parfois quelle serait la différence s'il s'agissait, à la place, de SMS avec des émoticons… D'autant que les dits visages, trop similaires entre eux, seraient difficiles à différencier sans l'aide du contexte, tant leurs traits androgynes varient peu.
L'aspect visuel insipide inquiète dès le début, mais il faut souligner encore une fois ce travers qui gâcherait n'importe quelle BD : la surprésence de phylactères. C'est le principe d'une BD, raconter par l'image. S'il faut la bourrer de texte, autant arrêter pour écrire une nouvelle ou un roman. Ici, le texte n'aide pas à mieux comprendre ou à enrichir l'image, c'est l'image qui sert à illustrer passivement le texte. La narration ne passe quasiment que par les bulles de dialogues. Et quel est alors l'intérêt d'un dialogue qui ne sert qu'à exposer les éléments de l'intrigue au lecteur ? Aucun.
Parlons de l'intrigue justement. Il s'agit d'un banal feuilleton dramatique. Concrètement, ça ressemble à des épisodes de Plus belle la vie, du drame psychologique flirtant avec le polar, des évènements réalistes mais peu crédibles se produisant autour des mêmes personnages, et se résolvant en les regardant discutailler sur leurs sentiments, à l'aide d'explications psychologiques de comptoir, sommaires et rebattues telles qu'elles inondent les productions "culturelles" de masse et dont les auteurs s'inspirant les uns des autres, en vase clos, seraient condamnés à répéter sans fin les mêmes stéréotypes éculés.