100 dollars pour un shérif par pierrick_D_

Frank Ross,paisible fermier,est assassiné et volé par son employé Tom Chaney,qui s'enfuit sur les terres indiennes où il intègre une bande de hors-la-loi.Mattie,la fille adolescente du défunt,réclame vengeance et engage pour capturer le salopard un vieux marshall fédéral borgne et alcoolo nommé Rooster Cogburn,un dur à cuire réputé pour pratiquer une justice expéditive.La jeune femme accompagne Cogburn dans sa traque et Laboeuf,un Texas Ranger prétentieux qui cherche aussi le fuyard mais pour un autre crime,se joint à l'expédition.Pas mal du tout ce western survenu vers la fin de la grande période du genre.Il faut dire que le générique est prestigieux avec Henry Hathaway,dont ce sera un des derniers films,à la réalisation,Hal B. Wallis à la prod,Elmer Bernstein à la musique et Lucien Ballard à la photo,rien que des pointures et des familiers du western.Wallis a produit des films de tous les styles mais le Far West est souvent présent dans sa filmo qui comprend entre autre "La charge fantastique","Règlement de comptes à O.K. Corral","Le dernier train de Gun Hill" ou "Les quatre fils de Katie Elder".Hathaway connait bien le genre également,il avait même shooté trois ans avant une histoire un peu similaire avec "Nevada Smith",où un jeune homme chassait les outlaws qui avaient tué ses parents.Il mène bien son affaire et utilise habilement le scénario de Marguerite Roberts,tiré d'un roman de Charles Portis intitulé "True Grit",le titre original du film qui sera repris par les frères Coen pour leur remake de 2010 avec Jeff Bridges et Hailee Steinfeld en lieu et place de John Wayne et Kim Darby.Les décors et les paysages sont magnifiques et variés,sublimés en outre par le Technicolor de Ballard,alors que la belle et puissante partition de Bernstein donne de l'ampleur à l'oeuvre.Le rythme est parfois ralenti mais des rebondissements surprenants viennent régulièrement relancer une intrigue qui garde son suspense jusqu'à la fin.Le sujet principal semble être la description de la dureté banalisée d'un monde où la violence est omniprésente.Nous sommes en 1880 et la civilisation gagne du terrain mais l'Ouest sauvage est encore un endroit où règne la loi du plus fort et où on ne s'offusque pas de grand-chose.Après le meurtre initial,que les autorités,débordées par les nombreux crimes et délits commis,ne semblent pas pressées de punir,on assiste à la pendaison de quatre hommes,à laquelle toute la ville,femmes et enfants compris,vient assister avec délectation.C'était normal en ce temps-là,une des distractions de l'époque,tout comme les romains allaient aux Jeux du Cirque.Et ça va continuer avec l'apparition de Cogburn,un marshall plus effrayant que les bandits qu'il poursuit.Le type est sans foi ni loi et ne connait que l'extrême brutalité pour régler tous les problèmes qui se présentent.Antipathique,âpre au gain,malhonnête,il ramène généralement ses proies plus mortes que vives et préfère toujours tirer le premier.Sa confrontation avec Mattie est savoureuse car la gamine est au contraire pétrie de principes d'inspiration religieuse et se révèle l'antithèse de Rooster.Mais ils partagent cependant un truc important,ils ont tous deux un caractère fort et indomptable,ce qui va bizarrement les rapprocher.On va voir au fil du voyage une relation père-fille se dessiner entre l'ours mal léché imperméable aux sentiments et la donzelle en croisade justicière.Derrière les apparences se cachent deux âmes blessées car Cogburn a eu une existence mouvementée et aventureuse qui l'a obligé à s'isoler et Mattie essaie d'oublier dans sa quête vengeresse le terrible chagrin que lui procure la mort d'un père qu'elle adorait.Ils s'engueulent fréquemment mais le respect mutuel et la sympathie vont progressivement s'installer entre eux et même avec Laboeuf,ce ranger coincé et content de lui qui exaspérait au départ ses compagnons de route.On retrouve ici cette tendance qu'a Hathaway à relativiser la catégorisation des personnages.Ce n'est pas noir ou blanc,les gangsters expriment parfois de l'humanité,la foule se repait d'exécutions en toute bonne conscience et certains représentants de l'ordre comme Rooster appliquent des méthodes plus proches de celles de leur gibier que de policiers légalistes.Wayne,62 ans à l'époque, a pour l'occasion remporté tardivement le seul Oscar de sa carrière,celui du meilleur acteur,et ce n'est pas volé tant il impressionne en marshall borderline au bout du rouleau,occupant massivement l'écran.Kim Darby,22 ans,était plus âgée que son personnage mais son curieux physique androgyne,elle ressemble plus à un garçon qu'à une fille,et son air candide la rendent crédible, et elle fait vivre avec talent une Mattie qui aurait pu être horripilante.Glen Campbell en revanche est très moyen en ranger bellâtre et se révèle plus convaincant dans son autre discipline,la chanson,incarnant joliment celle du générique.Parmi les seconds couteaux on remarque Strother Martin,habitué du western,ainsi que deux futures figures du Nouvel Hollywood,Robert Duvall formidable en chef de gang rusé et Dennis Hopper dans un emploi proche de celui qu'il tenait dans "Règlement de comptes à O.K. Corral",un jeune truand hésitant à trahir sa bande.