J'ai jamais autant pleurer devant un film ; je crois... Tu vois, ça m'arrive de pleurer mais pas comme ça, pas de la même façon. Je ne me suis jamais sentie aussi mal devant un film, je suffoquais presque. C'était horrible. Pour moi ça a été 120 minutes interminables ; de la torture. J'ai vécu ce film comme jamais ça m'était arrivé. Un mauvais rêve. J'avais envie de me lever et de partir mais je pouvais pas. Je pouvais pas laisser cette histoire sans fin, pourtant de cette fin je n'en voulais pas. Moi, ça m'allait bien le côté documentaire du début. Tous ces gens dans une salle en train de débattre. Ils font partie de la même communauté mais n'ont pas toujours la même opinion, c'est cool et intéressant parce que ça t'aide à te forger la tienne sur le sujet. Au début t'es d'accord avec Sophie et puis en fait tu te dis que Sean n'a pas tort. Voilà, t'es au milieu de ces gens et t'as plus envie de les quitter. Mais la partie "docu" ne peut se suffire à elle-même ; tu le sais depuis le début et tu redoutes un changement de ton, tu redoutes la suite. Et soudain ça tourne au drame.
Le cauchemar. Tu sens une larme te rouler sur la joue, tu l'essuies super vite en espérant que personne ne t'aies vu. Puis t'en essuies une deuxième, une troisième, ... Tu ne peux plus te retenir, ça coule tout seul. Tu te demandes quand ça va finir et tu regardes la sortie avec envie. Enfin si tu sors t'es un monstre hein ! Tu restes jusqu'à la fin et puis tu laisses le film continuer à te faire mal. Complètement maso celle-là ou quoi !
Tu continues à regarder ces gens. Nathan, Sean, Sophie, Thibault, etc. Au début ils dansaient dans la foule, dans les manifs ; maintenant ils forment un cortège funèbre.
Tu prends du recul. C'est qu'un film après tout. Mais tu ne le vois pas le film. Certes, il y a quelques trouvailles artistiques, la bo est sympa, esthétiquement c'est bien mais c'est classique (cela dit, certaines idées de mise en scène sont géniales). Tout est assez réaliste, ça se ressent notamment dans le jeu très juste des acteurs (tous excellents). T'as envie de te dire que ça fait trop "publicité préventive" mais il y a cette deuxième partie qui t'empêche de penser complètement ça. Et en fait la première partie qui donnait ce goût de "publicité préventive" c'est la meilleure. Faudrait savoir... Elle est drôle et grave en même temps, c'est là que tu t'attaches aux personnages, que tu comprends les objectifs de "Act up", etc. Le truc c'est que sans la deuxième partie, le film, il faut se l'avouer, n'aurait pas été autant coup de poing.
Tu ne regardes pas 120 battements par minute, tu le subis. Tu subis toute cette tristesse, toute cette tragédie. C'est clair qu'à côté de Campilllo, Racine fait pâle figure ! Parfois il y a quelques touches d'humour heureusement, c'est comme si tu pouvais enfin respirer, tu sors la tête de l'eau, tu reprends ton souffle et tu replonges ; tu te noies.
Le générique défile sans musique, silence complet dans la salle. Wahou, quelle claque !
J'ai envie de détester ce film parce qu'il m'a touché en plein cœur, il m'a fait mal comme jamais un film ne m'avait fait mal. J'ai vécu ce film comme si ça n'en était pas un, c'était une des pires et en même temps une des meilleures expériences de ma vie. Objectivement parlant il a des défauts parfois un peu gros comme ce contraste trop appuyé entre les deux parties mais je n'ai pas envie de voir ses défauts. 120 battements par minute fait vivre et ressentir les choses de façon extrêmement intense et c'est quand même un des buts les plus importants du cinéma. Voilà, personnellement il m'a énormément marqué. C'est ce que je me suis dit à la fin mais pendant le visionnage j'étais incapable de réfléchir et de prendre du recul. Quand un film arrive à te faire ressentir autant d'émotions, à te marquer à ce point, je me dis que c'est forcément un bon film. J'ai détesté et adoré à la fois.