Je dois commencer par une confession : j'aurais préféré entrer dans la salle sans connaître la prouesse technique qui allait m'attendre, la claque eut sans doute été encore plus grande. Cela écrit, « 1917 » n'en reste pas moins de ces titres qui marqueront assurément l'année 2020 et trôneront en tête de nombreux tops d'ici décembre. Presque un soulagement, même, que de telles œuvres puissent encore être tournées. D'emblée, nous sommes plongés dans ce conflit dévastateur touchant à sa fin, où les esprits sont abîmés, le moral au plus bas, cette mission à la fois capitale et totalement suicidaire à laquelle sont amenés nos deux soldats en disant long sur l'absurdité des ordres et le drame humain ayant eu lieu durant ces quatre années.
D'ailleurs, je note à quel point cette œuvre est à part en rédigeant cette critique : j'ai énormément de choses à écrire, et pourtant j'ai beaucoup de mal à le faire tant ce film se vit sur grand écran, intensément, puissamment. Au-delà de cet incroyable tour de force nous présentant l'odyssée des deux héros en immersion totale, la qualité des décors, la puissance de la photographie, le brio sonore viennent ajouter à la très grande réussite formelle de l'œuvre, à l'image de quelques scènes d'une force rare
(cette course éperdue contre un ennemi (presque) invisible sur fond de feux d'artifice lointain est incroyable).
Quelques conventions, certes, notamment un recours important à la musique, mais je trouve celle-ci souvent adaptée, accompagnant puissamment un propos évoquant l'horreur vécue par chacun, où l'on croise quelques grandes figures du cinéma anglais contemporain, évoquant chacune différentes approches du conflit, mais exprimant presque systématiquement une grande lassitude, à l'image de ce lieutenant totalement désabusé, que l'on peut, hélas, comprendre... Du vrai, beau cinéma de guerre, renouant brillamment avec ses illustres aînés tout en traçant son propre sillon : nous connaissons peut-être déjà le titre de l'année.