Après l’engouement suscité par le premier épisode, les auteurs originaux se font producteurs et offrent à Juan Carlos Fresnadillo, jeune réalisateur espagnol méconnu, l’occasion de prendre en main la suite de 28 Days Later. Entouré de ses propres scénaristes, le cinéaste ibérique investit Londres pour une continuité dans l’histoire de l’épidémie de rage autour de nouveaux personnages et, au-delà de l’enjeu immédiat de leur propre survie, la rémission possible.


L’ouverture est parfaite.
Huis-clos saisissant, prévisible évidemment, mais mis en scène avec talent : six survivants sont barricadés dans l’obscurité d’une maison isolée, affaiblis par l’épreuve des premiers jours de la contamination. Quand un enfant arrive, poursuivi par des contaminés affamés, ils ne peuvent que le laisser entrer, mais dans l’instant l’infection pénètre le refuge également. Le sang gicle et la mort se répand.



Mise en scène nerveuse, fièvre irrépressible d’angoisse soudaine,



compassion immédiate et attachement sans retenue au personnage de John malgré sa fuite : celui qui en quelques minutes à peine perd ses rares compagnons de survie, ne trouve pas alors le courage de tenter de sauver son épouse. L’identification, d’entrée, embarque le spectateur



sur les eaux troubles et ensanglantées d’une dérive sans retour.



Quelques semaines plus tard, l’épidémie est contenue et les derniers contaminés sont définitivement morts d’inanition. Sous la protection de l’armée américaine, le rapatriement peut commencer au cœur de Londres, John y retrouve ses enfants. Éléments du conflit, ceux-là partent en vadrouille au-delà de la zone sécurisée dans l’idée de récupérer des photos de famille et d’autres affaires dans leur ancienne maison.
Ils y retrouvent leur mère, contaminée oui, mais immunisée.
Quand John, dévasté autant qu’heureux, béni, lui demande pardon, en un intense baiser d’amour, la contamination reprend dans le sous-sol médical de la zone sécurisée…


Juan Carlos Fresnadillo et ses complices d’écriture ne pondent pas le script original qui surprend le spectateur à chaque séquence, mais la simplicité de leur scénario joue



l’efficacité brute,



directe. Si les enjeux et le rythme ne surprennent pas, ce qui fait l’attrait de cette suite c’est bien la mise en scène au poing et la plongée dense au fond du regard de ces personnages. En ce sens, le cinéaste espagnol tente de ne pas dénaturer la marque initiale de Danny Boyle. Oui le budget est conséquemment plus confortable, retour au grain lisse et profond de la pellicule après l’expérience de la légèreté numérique, la lisibilité obscure y gagne, le réalisme, paradoxalement, aussi. Nuits d’effroi claires, ravages dans un Londres où l’on se situe sans hésitation à chaque instant pour une



visite apocalyptique,



et reprise de l’excellent thème original In the House – In a Heartbeat, puissamment angoissant.


L’autre aspect positif de ce budget à la hausse, c’est le casting.
Robert Carlyle en figure de proue d’une irrémédiable dérive, parfait du bout des lèvres jusqu’au fond des yeux, comme toujours, est la caution Danny Boyle de l’opus. Visage ancré dans l’imaginaire du spectateur, capable de déraper en un claquement de dent, n’importe quand. Face à lui, Rose Byrne tient là un de ses meilleurs rôles, le sait et s’y investit pleinement, avec peut-être un peu trop de sérieux, tandis que Jeremy Renner prend avec un plaisir non feint ses premières positions de sniper avant de bientôt devenir le Hawkeye des Avengers. Plaisir cinéphile sur le gâteau de l’horreur décharnée, deux tout petits rôles pour deux grands comédiens : Idriss Elba et Harold Perrineau. Les deux gamins s’en sortent bien également, mention spéciale à la jeune Imogen Poots, belle, agile et expressive.


Si l’ensemble suit un développement attendu, le film marque tout de même par des séquences fortes où ces comédiens font la part belle à l’angoisse irrémédiable des derniers instants, ainsi que d’autres, plus



spectaculaires et visuellement impressionnantes



– comme ce moment d’abandon inéluctable, l’armée dépassée applique une certaine morale militaire sans pitié aucune, à l’américaine justement : napalm all over the city, sur les civils.
Sur tout ce qui bouge.


Les deux producteurs britanniques laissent leur bébé zombie continuer de pousser ses râles de résurrection entre les mains sûres de Juan Carlos Fresnadillo : 28 Weeks Later n’est pas l’objet du renouveau qu’était son prédécesseur mais assure la continuité et insiste sur ces nouveaux angles apportés à un genre oublié, poussiéreux. Le cinéaste espagnol profite de l’occasion pour livrer



un film nerveux, frissons glacés sur la peau blême,



soif d’extraction et objet d’angoisse irrémédiable. Calibre coup de poing pour l’horreur zombie.
Quand l’écossais sortira l’ultime épisode, l’espagnol n’aura pas à rougir de son travail.

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