Déroutant, singulièrement construit, 2 automnes 3 hivers est une délicieuse tranche de vie que ses maladresses rendent d’autant plus touchante.

Il y a quelque chose de l’ordre de l’expérimental dans l’écriture de ce troisième long-métrage. Sébastien Betbeder ne savait même pas si son caprice deviendrait un objet de cinéma, et s’est finalement laissé rattraper par sa passion. Car 2 automnes 3 hivers est avant tout une succession de monologues participant graduellement à la construction de ses personnages, de leurs relations tissées au hasard des mots, et de leur histoire. Un OFNI agréablement différent dans sa manière de raconter une simple histoire d’amour et d’amitié.

Une composition qui n’entrave nullement l’émotion. L’histoire d’Arman, Amélie et leur entourage, personnages rendus attachants par leur caractère étonnement ordinaire, allie romance, mélancolie et humour. Vincent Macaigne, drôle et sincère, se distingue par une interprétation si juste que l’on croirait presque à un reportage ; une impression renforcée par la structure hybride de l’oeuvre. Une calvitie naissante, une coupe de cheveux plus qu’approximative et des tics de langages parfois ridicules, loin de rebuter, ne font qu’affermir cette proximité que l’on ressent envers l’imparfait Arman.

Les situations vécues par les différents protagonistes transpirent le vécu, le réel, à la manière d’un Bref, sans le cadre et les obsessions. Sébastien Betbeder a créé une immense private joke à son spectateur, nourrissant le parcours de ses personnages de références pop culture du français commun : cinéma, musique, télévision, politique, etc. De Jude Apatow à Bernadette Chirac, le réalisateur a choisi d’assumer ces références, de les mettre en scène et de leur conférer un véritable rôle au sein de son scénario.

Les chapitres rythmant l’action comme autant d’actes d’une pièce d’improvisation revêtent une importance toute particulière dans l’étrange impression d’éphémérité un peu inquiétante de l’ensemble. Pourtant, l’histoire ne va jamais où on l’attend, reflétant le tournage du film qui s’est en grande partie déroulé de manière improvisée, sans répétitions. Et si certains passages sont maladroits, si quelques rares répliques sonnent faux, ces incidents sont pardonnés au vu de cette rafraîchissante ingénuité qui donne à 2 automnes, 3 hivers un charme inattendu.
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le 29 juin 2013

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