"Où l'on retrouve Antoine Doinel, le héros de Truffaut, après son divorce"...Tout est dit ou presque dans ce court résumé. Et nous contemplons une dernière fois, ce héros malheureux, avec émotion parce que pour la première fois peut-être, nous comprenons qu'Antoine est seul, son assurance, ses mots ne sont que des bravades pour tenter de dissimuler son incommunicabilité.
Une dernière fois, Truffaut met en scène Léaud son alter égo de cinéma, le metteur en scène et l'acteur ont décidé que cette fin serait conclusive, et tous deux déjà se détachent du personnage. Car l'homme que l'on a découvert adolescent dans les 400 coups, ne veut pas vieillir, ne peut pas vieillir. Il restera ce jeune homme indécis, éternel adolescent, exalté puis atterré l'instant d'après parce qu'il n'arrive pas à grandir.
Alors, le jour de son divorce (divorce qu'il avait oublié), Antoine se noie dans les souvenirs d'une vie qui lui a échappé, Antoine se souvient des femmes de sa vie. Et à mesure que les souvenirs dévoilent des amours mortes ou des bonheurs fugitifs, Truffaut recycle, son cinéma, un bon tiers du film est composé d'extraits des quatre épisodes précédent de la vie de son personnage. Les nouveaux développements sont minimes, sans sortir du cycle des déconvenues inéluctables. Tel Sisyphe, Antoine aime, puis se lasse, s'éloigne, devient blessant. Puis Antoine se sent seul, souffre de ne plus être aimé, soudain Antoine n'est plus orphelin, mais enfant gâté, sa belle s'est éloignée, Antoine aimerait se rapprocher, alors il revient suppliant,
L'amour en fuite devait être le chaînon manquant du récit, révélant des fragments de vie non encore dévoilés. Au final, c'est avant tout un rendez-vous manqué, qui permet certes de découvrir Dani , une maîtresse inconnue ou Sabine, l'actuelle dulcinée interprétée par une Dorothée ... figée et récitante, ou d'admirer une dernière fois les "ex", et tout à la fois magnifiques, Colette et Christine, mais c'est également une redite qui ne permet jamais de faire évoluer notre Doisnel vers l'apaisement ou la maturité.
Truffaut, conscient des défauts du film, écrira d'ailleurs :
Je n'étais pas tellement content du scénario. L'originalité était d'avoir de « vrais » flash-back (Les 400 coups, L'Amour à vingt ans, Baisers volés, Domicile conjugal), mais pour les insérer harmonieusement, nous avions établi un script faiblard, très difficile à améliorer. Je savais en le tournant que je faisais une connerie. J'étais comme un fildefériste sans fil de fer.
Il n'y a qu'un seul critique qui ait écrit : « Ce film est une escroquerie ! » Il avait raison. C'est un film qui m'a beaucoup déprimé, et je l'ai sorti à contre-cœur.