On ne me l'enlèvera jamais de la pensée, John Milius est un artiste qui a du génie. Déjà metteur en scène du chef-d'oeuvre "Conan le Barbare", révolution du cinéma d'Heroïc-fantasy, j'étais donc très curieux de voir son "Aube Rouge", métrage à la réputation marquée car qualifié de produit appartenant complètement à son époque. Le soucis, c'est qu'il y reste bloqué, dans sa damnée époque.
Loin de moi l'idée de dire que j'ai détesté le film, car ce sera l'immoler gratuitement en place publique. Non, je n'ai pas détesté; j'ai même aimé certains de ses aspects, mais pas assez pour ne pas qualifier le film de médiocre film de guerre. Dès le départ, le métrage est profondément étrange; c'est loin d'être une tare, mais l'on peine à reconnaître le style de Milius. C'est un peu comme s'il avait fait un film de commande, et qu'il s'en battait la rate de faire une oeuvre marquante.
Bon, c'était sûrement pas le cas quand il l'a mis en scène, mais le résultat final fait un peu tâche dans sa filmographie. Une chose d'autant plus décevante que le métrage s'enduit d'un patriotisme béat et ricain à gerber ( en même temps, c'est jamais vraiment fin chez eux, et ça pousse souvent à la débandade la plus totale ). Seulement, cette impression ne concerne que le début de l'oeuvre, le génie de Milius opérant une nouvelle fois, l'empêchant de tomber dans le piège tuant 90% des productions cinématographiques concernant le film de guerre.
Je dirai qu'en suivant le film, qu'envoyant ses personnages évoluer petit à petit, on en vient progressivement à comprendre que le film n'a rien de patriotique; non, il n'aime pas l'Amérique, il n'aime pas la guerre. "L'Aube Rouge" est un film militant contre l'utilisation des armes et l'ultra-violence des conflits; "L'Aube Rouge", c'est une Amérique sous Reagan qui n'en finit plus de se perdre dans sa politique belliciste, à grands coups d'invasions barbares et de jeunes ânes cons ( Conan ) que l'on éduque au combat contre les rouges, contre "l'ennemi de tous les peuples".
Un constat d'autant plus ambigu que le film se complaît dans l'esthétisation de la violence, dans la "cool-attitude" de défourailler du russe à tout va. Call of avant l'heure de gloire, "L'aube Rouge" se veut rouge pour deux choses. Rouge pour les cadavres des communistes jonchant les ruelles de ce brave pays qu'est l'Amérique. Mais rouge aussi pour tout le sang versé dans un conflit sans intérêt, si ce n'est ceux de deux grandes puissances que leur peuple respectif ne comprenait même plus.
"L'aube Rouge" c'est donc le constat d'une guerre trop longue avec trop d'excès, mais qui tombe souvent dans ce parti prix d'aimer la violence qu'il refile à bouffer à des spectateurs toujours plus avides de sang artificiel, et de fausses morts de figurants fusillés par une foule de fringants et feules jeunes flingueurs. Point final...
A moins que je ne me prenne la tête pour rien et que le message de Milius n'était que "Mort aux rouges". Mais bon, dans ma toute conscience d'utopiste fini, j'espère encore que l'oeuvre était un poil plus sophistiquée et nuancée que cela.
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