Je l'ai déjà dit, je le répéterai jusqu'à la fin des temps, j'adore M. Night Shyamalan, non seulement je trouve qu'à son meilleur niveau il est l'un des meilleurs réalisateur de la planète, mais en plus d'un point de vue plus personnel, c'est un des mecs qui m'a fait aimer le cinéma grâce à Signes, un des films qui m'a définitivement lancé sur le chemin de la cinéphilie. Après le très bon The Visit qui lui avait permis d'enfin relever la tête suite au tournant catastrophique qu'avait pris sa carrière, Shyamalan prouve qu'il est définitivement de retour avec Split, film qui revient aux sources de son cinéma, et ce de nombreuses façons. Je ne vais pas spoiler, donc si j'écris comme un demeuré (plus que d'habitude j'entends), ne vous étonnez pas.
Déjà du côté de la réalisation, on retrouve le metteur en scène méticuleux qu'il était à ses débuts, avec un sens du détail impressionnant, un don incroyable pour installer la tension. Dès la scène d'ouverture au restaurant qui présente les filles, puis la scène de la voiture avec leur enlèvement, il arrive en à peine 4 minutes à nous présenter tous les enjeux et personnages du film, leurs caractères, tout en installant une ambiance sacrément malsaine.
Au delà de sa splendide réalisation, Shyamalan est extrêmement doué pour tirer d'excellentes performances de ses acteurs, après tout il est un des rares capables de faire jouer des gosses convenablement, et encore plus dur, à tirer à deux reprises des performances ahurissantes de Bruce Willis. Alors quand il dirige l'un des acteurs les plus talentueux (et sous côté), James McAvoy, laissant ce dernier jouer Kevin, un personnage qui possède 23 personnalités, ainsi qu'Anya Taylor-Joy, une des actrices les plus en vue du moment, qui joue Casey dans un rôle bien plus complexe qu'il n'y paraît, on se retrouve avec deux performances de qualité, qui si elles n'étaient pas aussi éloignée des Oscars mériteraient bien des nominations pour les deux. McAvoy ne joue certes que 6 ou 7 personnalités au total, mais il arrive à poser suffisamment son empreinte sur chacune d'elles pour qu'elles soient reconnaissables quand on les revoit dans le film (cela dit les changements de vêtements aident beaucoup). Pour Anya Taylor-Joy, elle est au premiers abords la final girl classique, mais son personnage est subtilement développé grâce à différents flashbacks qui courent tout au long du film, et qui permettent d'offrir au film une interprétation supplémentaire.
Ainsi que l'on soit du point de vue de Kevin ou de Casey, ou bien si on prend les deux à la fois, on se retrouve avec une vision potentiellement différente de l'histoire, un peu comme pour Sixième Sens, Incassable et Signes, en gros Shyamalan à son meilleur, un mec bon dans tous les domaines, et notamment dans l'histoire, avec un film qui gagnera à être disséqué de long en large.
J'ai malgré tout quelques problèmes avec le film, que j'ai trouvé un peu long, 10 ou 15 minutes en moins auraient peut-être permis d'avoir un meilleur rythme, surtout qu'on a malheureusement des dialogues qui font beaucoup trop d'exposition, notamment via le personnage de la psychologue, dont l'unique utilité réside dans ce but. De plus, certains choix faits par le film demandent une confiance aveugle en Shyamalan, et ne sont pas forcément des plus appréciables au premier abord.
En conclusion, Shyamalan signe un retour aux sources des plus réussis, un thriller horrifique angoissant, malsain, qui ne tombe jamais dans la facilité et ose même aller très loin, quitte à perdre une partie du public en cours de route, mais le monsieur est un réalisateur et un scénariste tellement doué, maîtrisant tellement son script, qu'il faut savoir lui accorder une confiance aveugle afin de pouvoir apprécier pleinement son œuvre. Certes très bien aidé par les superbes performances de James McAvoy et Anya Taylor-Joy, ce film est avant tout du pur Shyamalan. Le retour d'un géant, qui espérons le ne retomberas jamais dans ses travers.
Puis pour parler spoiler deux secondes, le coup de la pédophilie est super osé, je ne l'avais pas vu venir, et bizarrement Shyamalan arrive à nous faire passer ça même si c'est quelque chose qu'on a déjà vu trop souvent au cinéma (dans la réalité aussi malheureusement), « cliché » utilisé de sorte à créer une empathie bas de gamme pour les personnages, à tel point que ça en devient insupportable la plupart des fois où des films nous font une révélation dans le genre. Mais là, non seulement c'est révélé au milieu du film, mais c'est à la fois ultra bien filmé, ultra malsain, ça m'a limite filé la gerbe alors que comme je l'écris une phrase avant, je suis un sombre connard qui considère presque ça comme un mauvais cliché de cinéma, et en plus ça sert directement l'histoire principale, ça nous permet de comprendre le personnage de Casey, ses actions, ses réactions. Puis ça rend aussi sa dernière scène absolument atroce, son regard, quand la policière lui dit qu'elle va la ramener chez son oncle, dit tout.
Ensuite évidemment on en parle plus, la scène finale absolument fantastique. Dès que les premières notes de la musique d'Incassable ont commencé à résonner, je me suis pissé dessus, la salle était bondée, désolé pour l'odeur, mais j'en tremblais de joie, l'apparition de Bruce Willis, ce n'est que du bonus, le fait que ce dernier arrive après l'écran titre, c'est encore une fois du génie car ça prouve que le film n'avait pas besoin de ça pour être mémorable, et qu'en tant que film d'horreur, il est déjà excellent à lui tout seul, mais en devant un spin-off caché d'Incassable, le film prend une dimension incroyable. Non seulement parce que ça explique les rares éléments du film qui semblaient forcés, mais en plus il relance une franchise dont l'unique film jusque là datait d'il y a 17 ans, qui était un de ses plus gros succès critique, sans baser sa promotion dessus. Puis le mec m'a rendu heureux de voir Bruce Willis dans un film en 2017, si ça c'est pas un exploit.
J'ai hâte de voir ce que le film réserve pour Shyamalan, avec notamment la désormais très attendue suite à Split et Incassable, en espérant qu'il reste associé à Blumhouse parce que force est de constater que leur association a permis de faire renaître la carrière d'un des metteurs en scène les plus talentueux d'Hollywood.