Don Siegel revisite ici le film noir en en détournant, voire même en en renversant les codes, à commencer par le fait que le film se déroule presque entièrement en plein jour, en pleine lumière, avec des couleurs éclatantes qui sont liées au mouvement Pop Art et que l’on trouve aussi, par exemple, dans Made in USA de Godard, deux ans plus tard. Pas non plus de policier ou de détective et, idée particulièrement géniale, ce sont les tueurs qui mènent l’enquête.

Malgré un titre original identique, The killers, Don Siegel se démarque donc aussi complètement du film de Robert Siodmak qui avait déjà adapté la nouvelle d’Hemingway en 1946 avec Ava Gardner et Burt Lancaster.

Le moteur du film est donc la question que se pose Charlie (Lee Marvin), tueur vieillissant qui aimerait bien prendre sa retraite : pourquoi leur dernière victime, Johnny North (John Cassavetes), s’est-il laissé tuer sans opposer la moindre résistance. Ce questionnement qui obsède le tueur fait du film une sorte de quête métaphysique sur le sens de la vie et du pourquoi on peut accepter la mort.

À bout portant se révèle une œuvre sèche et nihiliste dans laquelle aucun des personnages principaux n’est honnête ou même positif. Le film est violent, d’une violence qui n’est pas suggérée mais directe, ce qui lui permis d’ailleurs d’être distribué en salle car il était à l’origine destiné à la télévision qui n’en voulut pas du fait de cette trop grande violence.

Don Siegel a parfaitement su sentir et participer à l’avènement du cinéma d’action moderne, désenchanté, pessimiste et brutal. Dans À bout portant personne n’en réchappe !

A noter que nous avons ici la dernière apparition à l'écran de Ronald Reagan avant son entrée en politique et son unique interprétation d'un rôle de méchant, ici un criminel en col blanc, véritable incarnation du pouvoir capitaliste.


Jean-Mariage
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le 13 oct. 2024

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