Entre aventure et thriller, ce film typique des années 1990 au titre français complètement débile a quasiment disparu de la circulation. Éreinté par la critique à sa sortie, le résultat est pourtant plutôt sympathique. Alors qu’on craint une entrée en matière mollassonne et étirée à l’extrême, le film entre rapidement dans le vif du sujet. En moins d’une demi-heure, les personnages sont esquissés et nos protagonistes échoués en pleine nature au terme d’un accident particulièrement spectaculaire. Le « survival » peut dès lors débuter. L’atout majeur du film est indubitablement ses formidables paysages de l’Alaska. Bien filmés, ils permettent de s’immerger totalement dans ce film de survie en territoire hostile. Après avoir posé les premières problématiques typiques du genre (l’abri, le feu), l’enjeu se concentre sur la présence d’un ours mangeur d’hommes.
Alors qu’on imagine un film plutôt psychologique centré sur l’antagonisme de ses personnages, on a droit pendant une bonne partie à cette lutte implacable entre l’homme et un animal redoutablement dangereux. Les scènes sont d’autant plus impressionnantes que l’animal en question en impose. Pas d’images numériques ici ou d’effets spéciaux dépassés. La confrontation est bluffant de réalisme. Mais il est dommage que David Mamet, dont les premiers scénarios étaient des modèles de rigueur, s’éparpille, tourne parfois en rond puis oublie par moments l’essentiel. La question de la nourriture est ainsi reléguée, et c’est regrettable, à l’anecdote. Trois jours sans manger ne semble ainsi pas affecter notre trio qui pète la forme ou presque. D’autres points de ce type sont également négligés, ce qui nuit à la crédibilité du récit.
Enfin les ruptures de ton sont parfois surprenantes et on finit par avoir un peu de mal à suivre les personnages. La confrontation tant attendue n’a ainsi pas lieu, et le film semble finalement s’évertuer à l’éviter pour dresser un portrait discutable de ses protagonistes. C’est un parti-pris dommageable qui éteint la dimension thriller de l’ensemble pour le rapprocher davantage d’un drame peu convaincant. Rien de rédhibitoire mais le film tue dans l’œuf une intensité qui lui aurait été bien profitable. L’interprétation dominée par Anthony Hopkins et la musique de Jerry Goldsmith, qui rappelle souvent sa partition de Rambo, constituent deux autres atouts supplémentaires à ce film sympathique qui, malheureusement, plafonne un peu vite.