Par sa modernité de ton et d'interprétation (et parce qu'il est en couleur), ce récit chabrolien de turpitudes bourgeoises tranche, à son avantage, avec les drames bourgeois d'une autre école (celle de la "qualité française"). Claude Chabrol ne réalise pas ici un chef-d'oeuvre de la Nouvelle vague mais son ironie et son audace dans les portraits, la force et l'âpreté de certaines séquences, concourent pour faire d'"A double tour" un drame satirique détonnant.

L'action se passe pour l'essentiel dans une maison bourgeoise. Le père de famille, le notable Marcoux, vit une passion désormais sans partage avec Léda, une jeune voisine étrangère; le fils lorgne sur la bonne et la fille s'est entiché d'un aventurier a priori frivole (Belmondo, déjà désinvolte et talentueux); tandis que la pathétique maîtresse de maison (excellente Madeleine Robinson) tente à tout prix de sauver les apparences. Elle personnalise, d'une certaine façon, la bourgeoisie de province comme la voit et la verra toujours Chabrol, soucieuse de respectabilité et des convenances, enfermant sa famille dans le conformisme social et moral de sa classe.

Le drame à venir

-le meurtre de

Léda qui incarne, elle, par sa liberté et sa séduction, un contre-modèle de la bourgeoisie- stigmatisera les frustrations du bourgeois et les choix plus ou moins légitimes que chacun fait pour échapper aux obligations de son milieu. Avec au passage cette scène superbe, d'une rare violence morale où l'époux déverse en des qualificatifs haineux tout son mépris et son désamour au visage de sa femme

.

La résolution de l'intrigue et la

découverte de l'assassin de Léda

comptent manifestement moins que la démonstration satirique de Chabrol que d'aucuns trouveront caricaturale mais dont les autres apprécieront les métaphores intelligentes, la nouveauté et sa parfaite et précise mise en scène.

inspecteurmorvandieu
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le 20 oct. 2024

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