"Cimarron Kid" est le premier western de Budd Boetticher, qui se révélera peu à peu être un génie du genre. Ce petit western de serie B, de chez Universal, annonce toutes les qualités du réalisateur qu’on adorera plus tard dans la serie avec Randolph Scott (entre 1956 et 1960), la fin du cycle Ranown qui, à partir de 1949 associe pour 14 films à la Columbia l’acteur Randolph Scott et le producteur Harry Joe Brown.
Dans un somptueux technicolor de William Fritszche, avec le directeur photo Charles P. Boyle (les mêmes sont dans The Man From Alamo, et Horizons West, tournés la même année par Boetticher), c’est une variation sur l’histoire d’un outlaw célèbre : Bill Doolin, lié aux frères Dalton puis leader de la Wild Bunch (la Horde Sauvage). Par exemple, il y eut en 1949 "Face aux Chatiment - The Doolins of Oklahoma" de Gordon Douglas, avec Randolph Scott dans le rôle.
Il s'agit bien ici de la premiere "Horde Sauvage", car il y en a eu une seconde, celle de Butch Cassidy. Autant le dire car sous cette dénomination il y a profusion et confusion d’entités : les deux Wild Bunch historiques, et plusieurs autres, de nature cinématographiques, fictives, très variées dans les films américains ou les western spaghettis.
Tous ces délinquants furent, historiquement, d’abord des révoltés contre les abus des grands éleveurs ou des grands propriétaires, y compris ceux du chemin de fer, aussi leurs spécialités furent-t-elles des vols de banques (spoliatrices des petits épargnants) et des attaques de trains, avant de devenir eux-mêmes âpres au gain (plutôt que des robins des bois) et des tueurs sans merci.
Dans ce film, c’est le coté "hors la loi malgré eux" qui est mis en exergue du début à la fin, pour tout le groupe, qui apparait donc sympathique jusqu’au bout, joué d’ailleurs pas des acteurs aux visages avenants, aux allures élégantes et aux manières policées (qui deviendront des acteurs de premier plan à la télévison comme James Best ou des seconds rôles recherchés comme Noah Beerry, Hugh O’Brien ou Frank Silvera).
Il y a aussi deux héroïnes, qui évoquent deux soeurs liées au gang, qui existèrent dans la vraie vie notamment comme hébergeuses et informatrices, et elles sont ici très belles et vivantes, bien costumées, avec des rôles actifs donc, pas du tout des potiches comme souvent dans les westerns.
Mais, comme c’est courant à l’époque, le scénario édulcore la vérité : il y a même une sorte de happy end alors que le vrai Doolin a fini avec des dizaines de balles dans la peau.
C’est le problème de ces westerns de serie B quand ils s’inspirent de personnages historiques : ils simplifient à outrance, si bien que le récit paraît toujours peu crédible voire bizarre : on ne comprend jamais bien les ressorts de leurs actes ou l’articulation des événements.
Ici la concison, les cadrages, le rythme, la mise en scene au cordeau des actions rendent quand même le récit captivant, de même que le soin dans le choix de l’iconographie : les décors de combats sont très originaux comme la rotonde du chemin de fer, ou le dépôt de bois près des rails pendant la nuit.
Même la musique de Joseph Gersherson (compositeur qu’on retrouve dans presque tous ces petits westerns, et dans plus de 300 films) est exceptionnelle : on sent bien que toute l’équipe est sur le pont pour réussir ce petit film.
C’est le 4eme western de Audie Murphy après Kid of Texas, Sierra, et Kansas Raiders. (Juste avant ce film, Audie Murphy a tourné avec John Huston « The Red Badge of Courage », tiré du beau livre de Stephen Crane sur la guerre de sécession, où il joue un homme pris de lâcheté sur le front, lui qui fut le soldat le plus décoré de la 2eme Guerre mondiale).
Il n'y pas de gunfight final : il est cerné par la milice dans une grange, là où l’a entrainé sa fiancée par tromperie mais pour le protéger d’une exécution sommaire, et il part les menottes aux mains après avoir embrassé la belle traitresse !
(Notule de 2018 publiée en janvier 2025)