Cronenberg et la violence
Le scénario est celui d'un comics, noir et sanglant, où la violence vient faire irruption dans le quotidien et irriguer le film en flux vital, en dynamisme brut. Comme dans "Les Promesses de l'ombre" -autre film de Cronenberg, également avec Viggo Mortensen, les deux fonctionnant en diptyque- une certaine vision du "mal" se dessine en creux de la société occidentale, comme une lèpre souterraine qui parfois refait surface, meurtrière. L'acteur principal est la pierre angulaire du film, l'incarnation de ce surgissement inattendu au coeur de la banalité : l'homme ordinaire soudain meurtrier, tueur à l'instinct, animal (cf. la scène chez son frère, à la fin). Tout prend l'apparence, sous la caméra du canadien, partant d'une histoire terriblement simple, presque de série B dans ses articulations, d'un formidable élan de mort. Ce qui se joue ici, dans le visage tour à tour innocent et sauvage de son personnage, c'est le symptôme d'une Amérique rongée de l'intérieur par son mal, au plus profond du noyau familial, terreau fertile où germe et croît la moindre graine de violence.
Un film à la beauté terrible, porté par un acteur génial.