La planète Terre, dans le futur. Les calottes glaciaires ont fondu, les océans ont recouvert pas mal des zones autrefois côtières, des villes comme Amsterdam, Venise et New York ont été englouties. Les humains n’ont cessé de développer la technologie à tel point qu’aujourd’hui les villes sont peuplées de mécas presque autant que d’humains, tout plein de robots qui nous ressemblent à s’y méprendre, sauf que nous on est des orgas et pas eux.


La Cybertronics est l’une des principales firmes de création et de production de mécas ; et c’est elle qui a l’idée de créer le premier robot enfant, un robot qui à la différence de tous les autres serait programmé pour aimer vraiment ses parents adoptifs. Histoire de combler le déficit affectif de beaucoup de couples, puisqu’il faut une autorisation de grossesse en raison du surpeuplement de la planète. Et puis, ça ouvrirait un nouveau marché bien lucratif, et une telle raison suffit. C’est ainsi qu’est conçu David, le petit garçon robot (Haley Joel Osment) ; ses parents adoptifs sont Henry et Monica dont le vrai fils est dans un coma profond depuis un certain temps. David aime sincèrement sa mère qui le lui rend bien, mais c’est quand même pas facile de se prendre d’affection pour un être de métal et d’électronique. Et puis, il faut bien l’avouer, ce gosse est tellement parfait avec son beau sourire niais et cette agaçante façon de prendre les choses du bon côté, qu’il vous tape vite sur les nerfs. Le pire est qu’il devient super pote avec Teddy, un gros nounours en peluche qui marche et qui parle, et qui joue le rôle d’une conscience morale et philosophique durant tout le film.


Mais un premier choc se produit quand Martin, le fils naturel, sort du coma et revient à la maison. Âgé de 10 ou 11 ans lui aussi, il ne cesse de rivaliser avec David et ne se prive pas de le rabaisser en lui rappelant sa condition non-humaine. L’âge bête, quoi, celui où les défis consistent à bouffer le plus vite possible un plat d’épinards, ce qui n’est pas conseillé pour les circuits électroniques d’un méca. Tout se complique quand Maman Monica, qui a quand même du mal à ne pas préférer Martin à son gosse robot, décide d’abandonner celui-ci dans une forêt. C’est triste, elle pleure, lui aussi, mais elle finit par se barrer, et David se retrouve paumé dans les bois avec pour toute compagnie le ridicule Teddy.


Après cette longue et pénible phase d’exposition, le film s’envole dans des sphères philosophiques propres à Spielberg : David, qui veut à tout prix retrouver sa maman, doit pour cela devenir un vrai petit garçon, et il croit dur comme fer que c’est possible parce que Pinocchio, qui était en bois, a été transformé en être humain d’un coup de baguette magique de la fée bleue. Donc, David se met en quête de la fée bleue. S’ensuit sa rencontre avec Joe (Jude Law), le méca-gigolo conçu pour donner du plaisir aux femmes ; puis diverses tribulations où ils manquent de laisser leur peau (synthétique) aux chasseurs de robots, puisqu’ils ne sont pas recensés.


Enfin, arrive ce qu’on croit être la fin : David et Joe ont appris qu’ils pourraient trouver la fée bleue dans la mythique ville de Man Hattan (d’où aucun robot n’est jamais revenu), dont seules les cimes des gratte-ciels dépassent de l’océan. Et en fait, ils arrivent au siège de la Cybertronics, là où se trouve le créateur de David. On se dit, ça y est, il va le transformer en vrai petit garçon et ce gosse robot va arrêter de nous gonfler avec sa maman qu’il aime tant, mais non : il lui dit « c’est super, tu es une réussite totale, nous sommes fiers de toi, tu as réussi à venir jusqu’ici, le programme est un succès sur toute la ligne, il va pouvoir prendre un nouvel essor, viens voir par là tous les petits robots David qui attendent d’être livrés à leurs acheteurs ».


Mais David est un robot conçu pour aimer, alors ça il apprécie pas, mais pas du tout ; et le voilà désespéré qui se jette du haut du gratte-ciel dans l’eau en contrebas. On se dit : ça y est, il se suicide, le film est fini, génial !


Pas du tout : sous l’eau il se retrouve dans une sorte de parc d’attraction englouti, dans lequel il y a, comme par hasard, un coin dédié à Pinocchio et une statue de la fée bleue. Et le voilà coincé dans son espèce de sous-marin à demander à la statue d’en face de le changer en vrai petit garçon. On se dit : ça y est, même bloqué au fond de l’eau il continue d’avoir la tête pleine de rêves, c’est beau, belle fin !


Eh bien non. Une voix off reprend la parole et nous informe que 2000 ans se passe, que les océans gèlent, que toute forme de vie disparaît de la Terre, et que maintenant c’est eux, des espèces d’extra-terrestres nourris au Sveltesse de Danone, qui font des fouilles archéologiques et qui viennent de retrouver David dans son sous-marin. Comble de la surprise, voilà le robot qui ouvre les yeux et qui sort de là en demandant où est sa maman. Là, ce qui n’était que naze devient vraiment n’importe quoi : les ET recréent sa mère à partir de l’ADN d’une mèche de cheveux, et le film finit par le tour de force de se terminer par un happy end que même les esprits les plus tordus auraient eu du mal à imaginer sans avoir bu à jeun. Et là on se dit : c’est fini, ouf !


Et c’est vrai, mais Dieu que ce fut long…


On aime : l’idée du robot-gigolo conçu pour exceller dans l’art du kama-sutra. Une fois qu’une femme y a goûté, jamais plus elle ne voudra d’un homme en chair et en os.


On trouve ça dommage : le gosse-robot est trop parfait, donc trop gnangnan, et par voie de conséquence très tête à claques.


On est désolé : le coup du copain nounours philosophe, on s’y attendait pas ; ça fait mal.


On est navré : le leitmotiv philosophique du film repose sur le parallèle avec l’histoire de Pinocchio : quelle est la frontière entre l’humanité et la robotitude ? D’autres que Spielberg ont donné de meilleurs réponses…


On a beaucoup de mal à encaisser le coup : la fin qui n’en finit jamais.


On pleure : les extra-terrestres, c’est vraiment un coup bas…

The Maz

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