Dans Une vie violente, Thierry de Peretti mettait en scène les conflits des nationalistes corses. A son image en constitue un peu le pendant, l'autre côté du prisme, puisque nous suivons cette fois-ci plutôt les femmes de ces nationalistes, et comment elles vivent les événements.
Antonia, héroïne du film, est photographe professionnelle et amante d'un nationaliste qui mène des opérations musclées armes au poing. Elle va donc documenter le conflit. Mais pour documenter quelque chose, encore faut-il comprendre de quoi il retourne. Or, plus elle se plonge dans cette "guerre", moins elle y trouve du sens, et encore celui-ci est-il encore tronqué par l'utilisation qui est faite de ses images.
Pour retrouver du sens, elle va partir couvrir le conflit yougoslave, une "vraie guerre". Cette échappée lui permettra de se rendre compte que le manque de sens est partout. Par ce contrechamp, à un endroit où elle se refuse à prendre la moindre photo "par décence", les discussions et actions des nationalistes deviennent comme vidées de leur substance. Ne reste finalement que des flambées de violence initiées par des jeunes jouant à la guerre. Reste alors la parole des femmes qui se demandent, revenues plus tôt de cet idéalisme : "Alors, c'est quoi notre vie, à nous?"
A l'image de cette héroïne qu'on nous montre mourant en heurtant un mur au début du film, le nationalisme corse est condamné : lui aussi va dans le mur. Car plus personne au sein du parti ne semble savoir ce qu'ils font exactement. Ainsi de l'amant, à qui Antonia demande : "Comment veux-tu qu'on se souvienne de toi? "Je veux qu'on dise que j'ai pas dévié, que j'ai toujours été droit." La question suivante n'est pas posée : dévier de quoi? L'engrenage tourne à vide mais, lancé, ne s'arrête plus. Opposant les extérieurs solaires et idylliques de la Corse à son intrigue sombre et désespérée, A son image s'avère un film bien plus noir qu'Une vie violente. Plus lucide?