Abuela est un film assez ambivalent dans sa construction, je trouve qu'on est en fait face à un film qui à la fois possède de grosses ficelles mais qui dans le même temps n'a pas confiance en lui.
Ca va spoiler fort.
Le film s'ouvre sur l'accident de Abuela (Pilar) et sur l'introduction de deux autres personnages, la voisine et sa petite-fille. Les cheveux de Susana sont montrés dès cette scène ce qui laisse peu de place quant à la question de la sorcellerie. D'ailleurs vers le premier quart du film l'origine de ce prélèvement capillaire sera également montré et assimilé à un évènement traumatique refoulé. On est donc fixé sur la nature de cette grand-mère.
Le truc c'est que pendant au moins toute la première moitié du film, cette grand-mère n'est pas la menace. On a peur pour elle ou d'évènements qui prennent part autour d'elles mais pas d'elle. Or c'est quand même dommage pour un film sur une sorcière, même si le film se rattrape un peu pendant la deuxième moitié du film, et même carrément pendant son climax. Plaza sait quand même utiliser à son avantage les longs appartements espagnols comme il l'avait déjà fait dans REC ou Malveillance et ça on ne peut pas lui enlever.
Dans cette première moitié du film donc, les éléments horrifiques tiennent lieux de péripéties mineures ou d'amuses bouches comme c'est souvent le cas dans les films d'horreur, pour introduire la folie ou la possession d'un personnage. Mais avec un personnage comme cette grand-mère, le film aurait pu être effrayant de bout en bout ! Par exemple a aucun moment la sénilité de cette grand-mère ne fait l'objet d'une ambiguïté. En fait si, il y a bien des moments d'état second où elle met ses plans en œuvre mais ils sont préparés par la mise en scène ce qui a pour conséquence de différencier des moments où l'on est "en sécurité" et d'autre où l'on sait qu'il se passe des choses. D'ailleurs au début du film ces deux temps vont classiquement suivre le rythme jour/nuit. Je pense que le film aurait gagné a mélanger ces deux temps plus tôt dans le film et à faire douter de la sénilité de Pilar, par des regards dont nous ne sommes pas préparés par la mise en scène (pour le coup un jumpscare n'aurait pas été de refus) ou simplement par la suggestion qu'elle puisse comprendre ou parler à Susana (et pas à des fantômes).
Je pense également que le décor aurait pu être mieux utilisé, non pas la structure de l'appartement mais les éléments tels que l'oiseau ou le portrait de Pilar. Le voir dans le coin du cadre ou surplombant une Susana déconfite m'aurait plus inquiété qu'une main de vielle sur un drap.
Le climax est quand même pas mal du tout, encore une fois la structure de l'appartement aide beaucoup à la tension et j'osais pas regarder les bords de l'écran de peur de voir dépasser un bout de vieille.