Il va falloir grandir maintenant
J'ai vraiment beaucoup aimé ce film. Je reconnais qu'il y a des défauts, notamment sur la fin par rapport au rythme, où les dernières scènes semblent juste collées l'une après l'autre sans réelle broderie, mais j'en ai été vraiment émerveillé par la façon dont les auteurs abordent les thèmes de l'amour, la mort, et surtout grandir. Pourtant, à priori c'était pas gagné. Dans un premier temps j'ai eu envie de le voir car l'affiche me tentait, et puis en plus Valérie Lermercier que j'apprécie (malgré ses navets) joue dedans ; puis après suite aux nombreuses mauvaises critiques, mon engoûement est retombé ; pour terminer, c'est un petit camarade moustachu qui m'a dit l'avoir bien aimé. On n'a pas les mêmes goûts pour tout, mais je sentais que je pouvais lui faire confiance (il me pousse souvent à découvrir des choses vers lesquelles je n'irais pas seul).
Et bien dès le début j'ai accroché. Cette façon de narrer l'histoire, de consacrer autant de temps à ses personnages m'a beaucoup plu. Les premières scènes sont vraiment magiques et mettent bien dans l'ambiance. Les dialogues sont remplis d'un humour pince sans rire, tout comme les situations, ce qui m'a un peu rappelé les films de Apatow et Anderson. Les sous thèmes sont nombreux (la vie, la mort, l'amour, la famille, ...), se cotoient et se renforcent. Les frangins Podalydes ont l'intelligence de fixer un objectif principal externe (enterrer mémé) afin de toujours pouvoir rebondir et tenir éveillé le spectateur. Car bien sûr, l'enterrement n'est qu'un prétexte (Objectif qui renforce tout de même le véritable objectif princiapal) pour parler de ce grand garçon qu'incarne Denis et qui est ici mis au pied du mur : il doit devenir un homme et assumer des choix de vie. Personnellement je pense que j'aurais pu me satisfaire de la scène de vélo comme fin, marquant ainsi une impossibilité pour le héros de faire son choix : le constat aurait été qu'il est impossible pour lui de choisir tant les deux possibilités qui s'offrent à lui lui plaisent. Les scènes suivantes sont tout dem ême superbes, l'enterrement en soi, puis l'anniversaire, et ... le choix improbable et poétique choisi (la réponse C invisible).
La mise en scène est plutôt intelligente. Ca ne paie pas de mine et pourtant, la caméra vient toujours participer au gag, et amène aussi un point de vue signifiicatif sur ce qu'il se passe. Il y a aussi une manière de filmer qui est légère, n'appuyant jamais trop sur l'humour ni sur le drame. J'aime ce genre de découpage. Le casting est aussi parfait. Arditi en papa sénile, deux belles brunes pour lesquelles le coeur de Denis bat, les gars des pompes funèbres hilarants (les gentils et les méchants), etc. La BO m'a aussi fascinné, elle ajoute un petit plus ; une fois de plus je me réfère à Wes Anderson qui lui aussi accorde beaucoup d'attention quant au choix de la musique.
Je vais quand même aborder les défauts du film. Car, j'insiste, il n'est pas parfait. Cette histoire est parfois un peu longue ; il faut dire qu'avoir pour héros un gars qui n'arrive pas à choisir, un peu comme Hamlet, c'est pas facile à gérer, le spectateur aurait facilement envie de lui foutre des baffes au bout d'une heure. L'intelligence des deux scénaristes, c'est de justifier cette hésitation, en montrant que chacun des deux choix peut apporter autant de bonnes que de mauvaises choses. C'est en ça que ça ressemble à du Apatow (Knocked up), ou même du James Brooks (How do you know) : on rationnalise l'histoire, on peut comprendre pourquoi l'homme choisirait une femme ou l'autre, ce n'est pas une comédie romantique au canevas habituel où la fille qui rit aux blagues du mec suffit de le convaincre que c'est l'élue de son coeur. Mais du coup, ce travail, aussi intelligent soit il, peut provoquer certaines longueurs. C'est surtout sur la fin que ça peut se ressentir. Comme je le disais plus haut, les 3 dernières scènes ne sont même plus brodées mais mises l'une à la suite de l'autre.
Bref, Adieu berthe ou l'enterrement de mémé est un film qui m'a touché par ses thématiques et sa technique. Je ne m'y attendais vraiment pas et j'ai maintenant envie de découvrir la filmographie de Denis Podalydès réalisateur (acteur aussi à l'occasion ; les rares fois où je l'ai vu, il m'a convaincu). Un film à savourer comme un caramel mou.
PS: en fait j'ai l'impression que mes références à Brooks et Apatow se 'justifient' par le fait que ces deux films ont des notes aussi basses que celui ci sur SC. Par contre, la référence à Anderson se justifie moins vu que son Moonrise Kingdom semble faire la quasi unanimité... C'est marrant!