Le Guay ou l'art de faire du très bon cinéma sans être un très bon cinéaste
Avec "Alceste à bicyclette" Philippe Le Guay confirme deux choses : premièrement ce n'est pas un grand cinéaste, deuxièmement il fait du très bon cinéma.
Après "Trois Huit", drame social par ailleurs très réussi, Le Guay a pris un virage, celui d'un cinéma populaire, au sens noble du terme, un cinéma modeste, malin, généreux, vif et qui ne prend pas le grand public pour une bande de bouseux incultes.
"Le Coût de la vie", "Du jour au lendemain", "Les Femmes du 6e étage" et maintenant cet "Alceste à bicyclette", autant de films qui sous des dehors légers parlent avec une certaine profondeur de l'humain, de la place de celui-ci dans la société.
Ici il scrute avec malice les travers de l'acteur, qu'il dépeint certes avec tendresse mais sans l'épargner.
Et Dieu sait si Luchini et Wilson semblent prendre un plaisir fou à incarner ces deux personnages narcissiques, égoïstes, qui ne vivent que pour être désirés. Comme toujours chez Le Guay, les comédiens donnent le sentiment d'une grande liberté de jeu et c'est ici particulièrement frappant, Luchini et Wilson se régalant clairement dans ces joutes verbales que permet le merveilleux texte de Molière, tout en étant finalement à l'opposé des personnages qu'ils incarnent, ni l'un ni l'autre ne voulant tirer la couverture à lui.
J'entends parfaitement ceux qui diront que le scénario a l'épaisseur d'une feuille de papier à cigarette, que la réalisation est un peu légère et en guise de réponse je n'aurai qu'un mot : plaisir.