"My understanding of women only goes as far as the pleasure."

La dose de cynisme délivrée par Michael Caine dans son rôle de Don Juan, en lice pour le concours du plus grand coureur de jupons de tous les temps, est un peu dérangeante, telle qu'elle nous parvient aujourd'hui. En un sens ce n'est une question ni de trop ni de trop peu : c'est davantage une question de mauvais mélange, avec parmi les ingrédients de base de cette comédie un détachement absolu de la part du protagoniste, qui passe l'essentiel de son temps à courir d'un lit (et d'une femme) à l'autre, et une bonne charge moralisatrice vers la fin du film, en confrontant Alfie aux conséquences de ses actes montrés dans toute leur irresponsabilité. L'association de ces deux tonalités ne produit pas un surplus de profondeur, ne s'apparente pas à une démarche constructive, et au final ne fait qu'alourdir le concept pourtant assez simple.


Ce qui sauve le film de cette maladresse, c'est le vide existentiel que Caine renvoie, en creux, loin du récit exhaustif de ses conquêtes féminines. On a droit à tous les cas de figure, certaines sont attachées, d'autres sont plus libres, certaines tombent enceintes, d'autres avortent, etc. Le charme de Michael Caine dans les années 60 ("The Ipcress File" 1965, "Gambit" 1966, "The Italian Job" 1969) n'aura jamais été autant mis à profit que dans "Alfie", très clairement. Mais Lewis Gilbert propose une vision des choses presque statique, sans grande évolution, comme un état de fait, même lorsque tout semble se déliter autour d'Alfie — dans un dernier segment un peu programmatique où tout lui tombe dessus, les unes s'étant acoquinées avec des hommes plus jeunes et les autres s'étant simplement désintéressées de lui. La remise en question que cela provoque semble un peu factice.


Pour le reste la dénonciation de l'hypocrisie de la vie sentimentale par un exposé de machisme frontal un peu trop désuet échoue un peu à faire le portrait de cette condition maussade, cette impression que la vie passe sans prise sur elle. Ce qui est sûr, c'est que ce film fut dérangeant à l'époque dans sa provocation jugée sulfureuse alors, avec une frontalité absolue dans la suggestion de la sexualité (c'est même plus de la suggestion à ce niveau-là) sans jamais montrer quoi que ce soit d'explicite. Le fait que le personnage brise en permanence le quatrième mur en s'adressant au spectateur dans les yeux presque constamment est en revanche un procédé très usant qui a mal vieilli. Sa logorrhée cynique cachant mal un vide existentiel est vite lassante.

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le 25 juin 2021

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Morrinson

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