On sent vraiment un manque de respect vis-à-vis des épisodes précédents, l'absence de fidélité aux originaux est assez flagrante. C'est un festival de répliques fécales et de scènes insipides à la gloire du grand Hollywood, sans la moindre audace filmique. De toute évidence, Jeunet était davantage inspiré par l'Aliens de Cameron que par les deux autres. Mais il en a extirpé le pire, exclusivement. A commencer par la "sympathique" petite troupe de têtes brûlées, forcément composée d'un noir et d'un latino, dont l'effectif se toise malicieusement entre deux rendez-vous avec la mort. La façon dont ils viennent à bout des hommes qui les tiennent en joue dans le gymnase est admirable, mention spéciale au calcul de balle ricochée pour atteindre le seul garde à opposer de la résistance (les autres ayant patiemment attendu qu'on les élimine un à un, sans qu'un seul d'entre eux ne réagisse).
La tension est quasiment inexistante, quelques tentatives malheureuses disposent de ficelles usées jusqu'à la corde. Le câble réfrigérant qui se détache brutalement du plafond, juste derrière un Gros Bill au timbre caverneux (qui fait semblant d'être aux aguets), histoire d'imprimer dans l'oeil du spectateur - l'espace d'une fraction de seconde - une queue d'alien... On y croit. C'est efficace. Ou pas.
On est censé assister à un film de la série Alien, allo !?! Ce n'est pas la présence d'un riff à la Jaws dans une poursuite sous-marine (par ailleurs l'un des rares passages de qualité) qui va nous faire péter le pace-maker. Avec Scott on avait un crescendo assez incroyable, les recours étaient multiples et graduels : des plans de plus en plus nerveux aux effets de fumée et de flammes en passant par le système d'autodestruction et ses sirènes d'alarme. Chez Cameron c'est l'urgence de la seconde partie et son ambiance de fin du monde imminente qui créent cette tension. Pour Fincher c'est un ultimatum avec la fonderie de plomb, une traque à double-sens dans un dédale pénitentiaire, et des idées avant-gardistes (l'alien en vue subjective dans de longs corridors, caméra qui virevolte...). L'environnement d'Alien 4 ne suscite, lui, aucun sentiment de claustration. Notre groupe de guérilleros, d'une nonchalance désespérante, n'a d'ailleurs pas trop de mal à déambuler dans le complexe militaire sans accès VIP.
Les incohérences sont assez nombreuses. A titre d'exemple : les aliens sont censés pouvoir projeter de l'acide par la cavité buccale - comme nous le prouve une scène pathétique lors de laquelle un mercenaire s'en prend une pleine gerbe dans la tronche (générée en CG de première génération, c'est assez hideux) -, mais ces charmantes bestioles préfèrent, dans une autre scène, sacrifier l'un des leurs pour pouvoir en déverser sur le plancher et ainsi s'échapper de leur enclos. Du pur génie mental dans l'écriture. Les acteurs, quant à eux, ne sont presque jamais crédibles, lorsqu'ils ne campent pas carrément des rôles comiques à en pleurer (le général Pérez de mon fion, avec ses poils de cul sur les épaules et ses mimiques trop lolantes...). Le ressort humoristique comme diversion à la médiocrité cinématographique, fallait y penser. Malin ! Cela dit les acteurs ne se contentent pas d'être mauvais, pour renforcer leur charisme on les a affublé de sapes issues des plus prestigieuses collections de couture parisiennes. A croire que la majeure partie du budget est passée dans l'attirail de cuirs design, boots gothiques, et autres fanfreluches pour mercenaires élitistes. Ca m'a rappelé le défilé JP Gaultier du Cinquième Élément, et à vrai dire on aurait pu croire à une production Europa Corp. avec ce quatrième volet baroque. Ce serait donc ça, la french touch ? Un aggloméré des pires fautes de goût élémentaires dans un film de commande qui crache à la gueule de ses illustres ainés ?
Dommage, parce que l'histoire était pas trop pourrie, avec un hybride déstabilisant et une scène de mise à mort juste magnifique. Mais en fin de compte Alien 4 s'apparente plus à une comédie qu'à quoi que ce soit d'autre. Enfin quand tu lis "Joss Whedon" au générique t'as compris.