Salieri, jadis compositeur officiel de l'Empereur et aujourd'hui vieillard reclus dans un asile, raconte le phénomène Mozart dont il s'accuse de la mort.
Quelque soit la vérité historique et au-delà de la richesse musicale du film, de l'écrin baroque que forme la reconstitution d'époque, Milos Forman peut s'appuyer sur deux personnages extraordinaires. Concernant Mozart, se détournant de la biographie substantielle et de la mythologie romantique du génie, Forman imagine un portrait qui décoiffe, fondé sur la dualité d'un jeune homme qui est tout à la fois un créateur magnifique, un travailleur acharné et un paillard, un noceur aux éclats de rire disgracieux. Cet Amadeus "galopin" introduit un ton de comédie dont le film ne se départira qu'à la fin, nécessairement plus sombre, au moment où Mozart apporte les dernières touches à son Requiem.
Son chemin croise épisodiquement celui de Salieri, personnage à part entière du film, et c'est aussi une dualité qu'exprime Salieri. L'admiration qu'il porte à Mozart, l'émotion qui le submerge devant sa musique alimentent aussi une jalousie et une haine qui tournent au blasphème. Salieri ne voit plus seulement en Mozart un rival mais l'instrument de Dieu, l'épreuve que Dieu lui impose, à lui le musicien modeste et dépassé.
La qualité des personnages et leurs interprètes remarquables, les décors et les oeuvres entendues, lesquelles dessinent, plus que des dates ou des anecdotes, la biographie mozartienne, s'associent harmonieusement dans un récit dès lors tout à la fois profond et esthétique.