Mon oncle
C’est encore le printemps, et bientôt le début de l’été. Il fait doux, tout semble léger, Paris est calme, intime, comme dans sa bulle. Et puis l’horreur surgit soudain, un soir, quand des...
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le 21 nov. 2018
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Le choc puis la renaissance. Après le bouleversant Ce sentiment de l’été, Mikhaël Hers revient au cinéma avec son troisième long métrage Amanda, une histoire de reconstruction dans le Paris hanté post-13 novembre où David (Vincent Lacoste), 24 ans, va devoir affronter la mort brutale de sa sœur et porter sur ses jeunes épaules l’éducation de sa nièce de 7 ans, Amanda. Un film lumineux, dont la délicatesse réchauffe les cœurs.
Au royaume des petites impressions, Mikhaël Hers est roi.
Il est important de disséquer l’approche cinématographique de Mikhaël Hers afin d’en comprendre toute la mécanique mise en place au service de la mélancolie. Très ancré dans le Paris d’aujourd’hui, Amanda multiplie les petites impressions à travers des plans de coupe, des interludes qui ne sont pas là pour leur seule valeur esthétique, mais surtout pour marquer le lieu et le temps, tels des moments suspendus. C’est une ombre d’arbre sur une école illuminée par le soleil couchant, le vent qui caresse les feuilles ou les lumières des nuits parisiennes. Des instants très purs qui apportent une atmosphère mélancolique, une harmonie sincère. Comme pour sacraliser cette beauté éphémère dans ce monde fébrile et violent. Un mécanisme déjà entrevu, et là aussi très efficace, dans les deux premiers films de Mikhaël Hers, Memory Lane et Ce sentiment de l’été.
Le choix esthétique de l’image de Mikhaël Hers participe également à l’atmosphère mélancolique. Elle est toujours sophistiquée grâce à l’utilisation de la pellicule (Super 16), le grain est prononcé, le teint chaleureux, la lumière apaisante. Un choix esthétique permettant de créer cette ambiance nostalgique, cette immersion dans ce Paris ensoleillé, cette sensation du temps suspendu.
Représenter l’horreur
Amanda a la lourde tâche et responsabilité d’être l’un des premiers films à parler de l’après, du deuil, des questionnements et de la douleur. Le cinéaste français questionne la bonne distance à prendre avec ses personnages et sa mise en scène.
« J’aurais trouvé indécent d’inventer une victime fictive pour un
événement terriblement réel qui a fauché tant de vies et qui
appartient désormais à l’imaginaire collectif. […] Le désir de saisir
la violence de notre époque est en partie venu des attentats, parce
que ceux-ci étaient le point paroxystique de la violence
d’aujourd’hui. Et par extension les attentats appartiennent désormais
à un tableau d’ensemble plus vaste d’une époque où l’on est rudoyé par
la perte de repères et la prise de conscience de notre fragilité »
Mikhaël Hers.
Il y répond de la plus belle des manières en se repliant gracieusement sur l’intime. Un choix du prisme de l’individu pour traiter du drame collectif, ici, complètement judicieux.
Le film esquive tout pathos ou sentimentalisme lourdaud pour donner dans la finesse et la mesure, grâce à l’utilisation du hors champ et de l’ellipse. On fait face à l’horreur, inévitable pour ensuite basculer vers la douceur des sentiments et l’épreuve, toujours emplie de mélancolie, de la violence et du deuil. La vie continue mais pas comme avant.
Une œuvre en développement
Avec ce troisième film, Mikhaël Hers se construit une trajectoire cohérente autour du deuil, de l’absence et de la reconstruction. Thématiques aussi touchantes que sincères que l’on trouve dès son premier film Memory Lane, dans lequel il effleurait déjà la perte d’un monde, celui de l’innocence, bercée par une approche mélancolique qui ne le lâchera plus. Puis avec Ce sentiment de l’été, bijou trop passé inaperçu, le cinéaste français abordait le deuil comme une guérison douce, le temps comme pansement au gré des successions estivales.
Dans Amanda, le voilà plus frontal, la tragédie se fait plus violente et l’urgence de la reconstruction plus rapide. S’occuper d’une nièce pour ne pas sombrer dans la tristesse : c’est l’enjeu humaniste et bouleversant qui se joue sous nos yeux et ceux, tout bleus, de la petite Amanda (attendrissante Isaure Multrier).
En trois films, Mikhaël Hers a toujours choisit le parti pris de la douceur, de la délicatesse et de la bienveillance. Une sorte de cinéma qui exploite les blessures pour mieux les panser. Avec, un regard toujours chaleureux sur ses personnages, aux dilemmes profonds, aux questionnements universels et l’opportunité pour Vincent Lacoste d’y trouver son rôle le plus juste, le plus fin, le plus bouleversant. Une année en forme d’apothéose pour le gamin des Beaux Gosses qui aura aussi brillé dans Plaire, Aimer et Courir vite de Christophe Honoré et dans Première année de Thomas Lilti.
Une conclusion sur des yeux humides, gorgés de vie et d’espoir et une pelouse verdoyante, où la plénitude de la vie reprend doucement son court.
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le 3 déc. 2018
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