Anatomie d'une mesquinerie

"Anatomie d'une chute" avait tout pour remporter l'Oscar du meilleur film étranger : Palme d'Or à Cannes, deux Golden Globes (meilleur film étranger, meilleur scénario). Mais voila, Justine Triet lors de la remise de la palme d'or a attaqué Rima Abdul-Malak, alors ministre de la culture, sur la politique française en matière de culture, alors que le cinéma hexagonal est le plus subventionné au monde (hors les cinémas d'état, genre Birmanie, mais où le scénario devient un cahier des charges propagandiste). Et donc la punition est la non présentation du film dans cette catégorie aux oscars (malgré le plaidoyer d'Olivier Essayas au sein de la commission), mais une médiocrité que l'académie des oscars n'a même pas retenu dans les nominations. La critique française voit très majoritairement dans le film un chef d'oeuvre.

Objectivement, le côté innovant de la mise en scène sur lequel s'épanche les plumes françaises m'a un peu échappé et je trouve au contraire la réalisation d'un classicisme suranné qui nous ramène trente ans en arrière (même les téléfilms du service publique sont aujourd'hui à ce niveau). Sur le déroulé de près de deux heures et demie des longueurs allongent inutilement le film (mise en place laborieuse et interminable pour redire la même chose, dispute trop longue, scènes trop étirées qui nuisent à l'intensité du film), photographie d'une platitude consternante, surtout les magnifiques extérieurs escamotés par la banalité et les scènes du tribunal, filmées avec une application scolaire.

Reste un très joli portrait de femme avec Sandra Hüller habitée par le rôle (elle mérite largement son César et nous verrons pour les Oscars) et le fils (Milo Machado-Graner) au rôle très travaillé et très écrit.

S’il n’est clairement pas un chef d’œuvre, "Anatomie d'une chute" (surtout comparé à « Le salaire de la peur », « Taxi Driver », « Apocalypse Now », « Kagemusha » ou « Le pianiste » et quelques autres palmes d’or) reste un bon film, ce qui est très minoritaire dans le cinéma français actuel.