Pour s'affirmer dans ce monde, on m'a dit qu'il fallait avoir un avis sur tout. La palme d'or n'en sera pas épargnée.
Me voici donc dans la salle, à l'annuelle séance de 2h30 pour découvrir le primé de Cannes. Les lumières s'éteignent, grosse lap dance d'entrée à 10h30 du matin, il faut s'attacher.
Je n'avais que très peu d'infos sur le film hormis que c'est une réadaptation plus réaliste de Pretty Woman réalisée par Sean Baker qui ne m'avait pas totalement embarqué avec ses Florida Project et Red Rocket qui me semblaient plus proches du reportage que de la vraie fiction.
La première partie est donc sans trop de surprises, avec un léger twist : les héros dépeints par Baker sont toujours à la marge, mais à la marge des plus riches. On y suit de manière assez linéaire une travailleuse du sexe qui s'embarque dans les aventures les plus folles des oligarques russes. Là encore, Baker est très proche des personnages et très descriptifs dans son récit.
Et là, la surprise est totale : l'arrivée de l'Arménien et tout bascule.
En une scène, on a devant nous une comédie qui se joue. Chaque personnage ayant part égale dans des situations de plus en plus absurdes, les dialogues, personnalités et la mise en scène nous ramènent au prime des frères Coen.
C'est là que Baker retrouve la force de ses anciens films. Il a un amour infini pour chacun de ses personnages et ne tombe jamais dans le piège du jugement et de la caricature. L'aspect "reportage" que je décriais avant lui a permis de faire ce film en nous exposant des faits et en montrant la profondeur de la plupart des personnages qui sont mis en avant. C'est un grand espoir pour le cinéma international alors que l'ignoble Sans Filtre avait été primé en faisant tout l'inverse : personnages caricaturaux, haine de ces personnages (et de l'humanité toute entière ?) de la part du réalisateur.
On a enfin une comédie qui arrive à se prendre au sérieux en n'oubliant pas toutes les problématiques inhérentes au récit principal.
On a enfin un film qui se risque d'aimer ses personnages tout en faisant avancer les évènements.
On a enfin une nouvelle comédie récompensée à Cannes.
En définitive, Anora est un film qui me redonne espoir pour la suite du cinéma international tant il propose une comédie tout en respectant chacun de ses personnages qui est sublimé dans la mise en scène et l'avancée des évènements. J'ai adoré les suivre dans les rues de Little Odessa autant que de les voir au plus profond d'eux-mêmes. Mention spéciale évidemment à Mikey Madison qui porte le film du début à la fin.
S'il vous plaît, allez voir ce film pour qu'on puisse montrer à tous que oui, les comédies ont une place dans le cinéma international.