Le qualificatif qui m'est venu en visionnant Anora, c'est : sympathique.
De là à mériter une Palme d'Or ?... Heu, c'est un film sympa, mais une Palme...
D'abord les faiblesses : une première partie qui traine en longueur. Certes, cela permet de découvrir cette jeune femme forte, qui assume son métier, qui refuse de se laisser faire. Anora a envie de dévorer la vie, et si argent et conte de fée sont au rv, c'est encore mieux. Mais ça commençait sérieusement à me lasser. Du coup les scènes de sexe me sont apparues comme un artifice pour maintenir le spectateur dans son fauteuil.
Puis les choses dérapent enfin... Et oui, c'est souvent drôle, mais j'ai franchement vu mieux. Les critiques ne semblent vouloir s'arrêter que sur ce point, une Palme drôle...
Alors qu'en fait, ce film vaut bien mieux. D'abord le casting, excellent. Chaque acteur joue sa partition à la perfection. Bien sûr, nos deux tourtereaux d'abord. Mikey Madison en jeune femme qui veut s'accrocher au rêve américain. Enfin l'accès à la fortune, au luxe, à la démesure ; face à Mark Alexandrovich Eidelstein, sorte de Timothée Chalamet défoncé, et lâche comme tout gosse de riche qui ne fait rien pour mériter toute cette profusion de liberté et de stupre.
La bande de bras cassés sensés veiller sur ces égarements somme toute assez fréquents, va nous régaler par un comique de situation bien dosé. Et il y en a un qui dégage réellement quelque chose, qui capte la caméra, c'est Youri Borrisov (Igor). Ce type a du charisme, mais tout en douceur. Je suis curieux de voir d'autres de ses prestations...
Que raconte ce film au final ? Il oppose plusieurs mondes, plusieurs conceptions de la vie, plusieurs générations, plusieurs minorités. Il confronte surtout le rêve américain devenu inaccessible, dont Anora va pouvoir mesurer la barrière infranchissable. Et c'est finalement dans une vieille Merco qu'elle trouvera un homme, un vrai... Mais chacun doit rester à sa place, toutes les places sont prises, il n'y a plus de place au panthéon pour les loosers magnifiques. Et alors ? Au final, ce n'est peut-être pas plus mal. Alors oui, Anora est un film cocasse, mais qui manque d'impertinence, en en montrant trop, il désamorce son récit. On sait l'intérêt que porte Sean Baker aux travailleurs du sexe. Mais un peu plus de subtilité enrichirait son sujet. Bien sûr, il vit avec son temps, nous présente une génération que plus rien n'effraie, ni vendre son corps, ni abuser des autres pour son propre plaisir. Anora est une fable de ces temps modernes, juste une fable. Un bon film que j'ai regardé avec plaisir, mais ce n'est pas tout à fait du calibre d'une Palme.