Alors qu’il devait originellement être réalisé par le talentueux et prometteur Edgar Wright (à qui l’on doit Shaun of the Dead, Hot Fuzz et Scott Pilgrim entre autres) qui aurait sans nul doute réussit à exploiter parfaitement le ridicule du personnage de l’Homme Fourmi, le projet de cette adaptation est finalement confié à un faiseur d’Hollywood : Peyton Reed (qui a même réalisé un film du nom de Yes man, comme quoi). La raison de ce changement de réalisateur n’est finalement pas très surprenante des studios Marvel, connus pour leurs prises de risques minimes et l’affreuse banalité de leurs films, et en dit long sur cette société bien trop paralysé par les actionnaires véreux : à quoi bon sortir un film de qualité apportant un véritable renouveau dans le genre déjà trop figé des super héros alors qu’un film banal est terriblement plus facile à faire ? Les artistes n’ont pas leur place chez Marvel : seul le résultat au box-office compte.


Le concept d’un Homme fourmi offre pourtant d’innombrables possibilités pour ne pas sombrer dans la banalité des films de super héros et bien que certaines pistes intéressantes de mise en scène et de réalisation soient présentes dans Ant Man (sans nul doute venant des huit ans de travail d’Edgar Wright sur le film avant son licenciement), le film prône une originalité qu’il n’a pas. Que l’on soit bien clair : faire un film « sombre » dans l’esprit de la trilogie The Dark Knight de Christopher Nolan avec pour héros l’Homme fourmi est strictement impossible, ou alors demande un talent colossal qui n’est pas la priorité de Marvel (engager des réalisateurs de sitcom pour réaliser les deux prochains films Avengers afin de pouvoir les sous-payer me donne raison). Le problème du film Ant Man est là, il nage entre deux eaux : il surf alors sur la vague du « dark » imposé par Marvel mais il possède également un ton plus léger que les autres productions du studio (excepté le seul véritable bon film de la phase deux de Marvel : Les Gardiens de la galaxie de James Guun, timidement original mais terriblement efficace dans son humour, son univers et surtout son décalage).


Des scènes telles que celle de la destruction de la maquette (qui semble venir de Wright, comme de par hasard) ou encore celle de la bataille dans la valise entre les deux antagonistes manquent au film, ce genre de scènes décalées et jouissives ne sont pas assez nombreuses alors que pourtant, le sujet d’Homme Fourmi s’y prête parfaitement. Richard Donner l’avait pourtant déjà compris en 1978 lorsqu’il adapte pour la première fois au cinéma Superman ou même encore Sam Raimi avec sa trilogie Spider man : il est parfois bon de créer un univers léger, simple et naïf pour adapter un comics, c’est finalement le meilleur moyen pour éviter le ridicule, en incorporant celui-ci à l’univers. C’est pour cela que toute la partie sombre du film n’est non seulement pas très réussis mais qu’elle n’a surtout pas lieu d’être. Il aurait fallu être complètement original et surtout être en décalage avec les autres films Marvel pour qu’Ant Man soit un succès.


D’ailleurs, Edgar Wright l’avait déjà bien compris : rattacher le film Ant Man aux autres films Marvel est une mauvaise idée, du moins en le faisant d’une manière aussi grossière et peu subtile (rappelons que si Wright a été viré c’est justement parce qu’il ne voulait pas connecter autant son film à l’univers Marvel entre autres).


Les personnages, quant à eux, subissent les conséquences de cette politique de Marvel. Entre un Ant Man développé grossièrement en un papa rédempteur et un Yellow Jacket transparent et parfaitement oubliable, Marvel nous montre encore une fois son désintérêt des personnages. Non là ce qui est important c’est de faire des caméos avec un Avengers, et puis faire du fan service (Hydra franchement dispensable). La présence des trois comics relief portoricains agacera également plus qu’elle ne fera rire (même si l’idée des flash back doublés est très bonne, sans nul doute un autres vestige du travail de Wright).


Le rythme du film est lui aussi à la ramasse : entre un premier et troisième acte tout bonnement correcte, le second traînera et tournera en rond pendant près d’une heure, oscillant entre charabia larmoyant (la mort de La Guêpe) et maîtrise tout sauf palpitante des pouvoirs du héros. Le scénario quant à lui est d’une affolante banalité, encore une fois, avec un méchant très méchant qui veut faire le mal et un gentil très gentil (qui a fait de la prison, mais qui est gentil) qui veut l’arrêter.


Après un Robert Redford fatigué dans Captain America : The Winter Soldier, nous avons ici droit à un Michael Douglas venu encaisser son chèque afin de payer sa villa d’été et un Corey Stoll parfois un peu trop investit dans son rôle de méchant. Entre ces deux-là, Paul Rudd et Evangelyne Lily (malgré son honteuse coiffure) offrent des performances acceptables.


Le véritable point fort (et encore le mot est fort) est la photographie du film. L’ambiance du film est déjà assez éloignée des autres films Marvel (seul différence d’ailleurs avec les autres Marvel finalement, auquel les héros sont presque tous interchangeables) en possédant une teinte presque « rétro » à l’effet « film indépendant » (ironique pour un film Marvel). Certains plans sont pour une fois vraiment beaux ou au moins dégage un sentiment de mise en scène (oui, dans un film Marvel !) comme le visuel de l’infiniment petit (élément là encore très mal exploité du film, et esquivé par une facilité scénaristique) ou encore certains plans disséminés par ci par là, comme des anomalies dans cet océan de banalité. Il ne faudrait pas être mauvaise langue là-dessus, mais il y a fort à parier que le seul responsable de ces petits miracles soit les vestiges du travail de Wright.


On le sait déjà, la réalisation est loin d’être le point fort des films Marvel : entre une caméra illisible dans Captain America : The Winter Soldier et une caméra prétentieuse dans Avengers 2, nous avons droit dans Ant Man à une réalisation ni mauvaise ni bonne, mais terriblement fade, excepté lors de quelques miracles, révélateur du travail, encore une fois, de Wright. Les scènes d’actions, peu nombreuses, sont par contre globalement ratées, tant elles sont filmées avec désintérêt. Certaines idées sont par contre à saluer, comme les zooms ultra rapide sur Ant Man quand il change de taille ou même le dernier combat, avec le train. Malheureusement, des idées comme celles-ci manquent et un goût d’inachevé se fait ressentir.


Il est alors assez ironique de se rendre compte qu’en 1993, Joe Dante exploitait déjà mieux le concept de fourmi humaine en apportant de vraies thématiques avec le personnage de Mant, véritable fourmi humaine, dans Panique sur Florida Beach, prisme révélateur de son amour profond pour le cinéma.


Le film n’est alors véritablement pas mauvais, mais il n’est pas bon pour autant : il est surtout terriblement fade et banal. Pas assez original pour être intéressant, Ant Man ne parvient pas à se démarquer de la masse froide de l’avalanche de film de super héros alors que le sujet promettait d’être une bouffée d’air frais. Les espoirs d’un renouveau du genre du super héros semblent alors condamnés si même un héros tel que Ant Man n’a pas droit à de l’originalité, et ce n’est pas le prochain Captain America : Civil War qui semble me contredire en s’enfonçant encore un peu plus dans la banalité. Heureusement, alors que seuls les « Yes man » semblent avoir le monopole des films de super héros, des auteurs se permettent également d’apporter leur vision artistique au monde, comme Bryan Singer et son récent Xmen : Days of the Futur Past qui possède certainement plus d’idée de mise en scène que l’ensemble des récents films Marvel. Son prochain Xmen : Apocalypse reste le seul espoir à l’horizon. Marvel semble alors condamné à la monotonie et au surplace, là où le récent chef d’œuvre Mad Max : Fury Road dépassait les frontières du blockbuster. Ant Man n’aura alors servit qu’à aguicher nos esprit des possibilités cinématographiques qu’offrent le rétrécissement corporel qui sera le sujet d’un des prochains films du très grand Steven Spielberg, Micro , adapté du livre éponyme de l’auteur de Jurrasic Park dans lequel un groupe de scientifiques se voient rétrécir au milieu d’une île tropicale à cause d’une expérience qui a mal tourné. Il n’est pas à douter que Micro sera alors certainement un meilleur film Ant Man, que le film Marvel Ant Man lui-même.

Flado
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le 18 juil. 2015

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