Les super-héros de Disney sont de retour, trop tôt cette année pour étouffer les bonnes découvertes de films indépendants ou qui réclament sans doute plus d’attention que cette phase 5, qui se lance aussi timidement que son acte précédent, au pire insipide, au plus anecdotique. Peyton Reed rempile donc dans une saga qui ne cesse de changer de dimension. Et à présent, c’est lui ce fameux « Yes Man », qu’il a pourtant bien dirigé et réussi à mettre en valeur les mimiques d’un homme aux mille grimaces. Ce credo pourrait cependant lui faire défaut, mais comme il est coutume de le rappeler, il n’existe aucun réalisateur-auteur à la barre d’un épisode du MCU. James Gunn reste l’exception qui confirme la règle. Tout le reste gravite autour d’un projet ubuesque au possible, sur un ton plus complaisant que satisfaisant. Autant affirmer que la recette n’est pas près de changer. Kevin Feige semble déterminer à servir les mêmes gourmandises sucrées et colorées à ses petits personnages, en imaginant que ce sera de bonne guerre pour son audience habituelle.
Quand bien même le récit ne dilate pas bien longtemps son exposition, il reste dépendant de flashbacks et d'une voix-off insupportable dès l'ouverture, nous rappelant ainsi des évidences que seul un étranger au MCU se sentirait concerné. Cela prouve cette réécriture permanente qui règne aux studios et qui n'arrange aucun spectateur, venu croquer sa tambouille numérique annuelle. Ne sachant pas comment rebondir correctement sur la continuité des autres films, nous atterrissons par mégarde dans le royaume quantique, un amalgame de créatures vivantes, mais en pilotage automatique. Les dialogues sont aussi niais que cette fable familiale que le film défend, contre vents et marées. La présence du scénariste Jeff Loveness, qu’on a vite fait récupéré de « Rick et Morty » pour ajouter un semblant de crédibilité, n’ajoute rien à l’aventure, qui n’ambitionne rien de plus que des étincelles numériques pour impressionner. Et de ce côté-là ça pêche également, malgré le fait que l’on sente enfin un monde habité, à la manière de belles planches de BD.
A contrario, le film ne cesse de dévoiler son incapacité à susciter un semblant d'émotion ou d'intensité, ce qui était typiquement le cas dans toute la quatrième phase. Nos héros naviguent sans destination précise, se cherchant les uns les autres, puis se séparent à nouveau pour créer une illusion rythmique. Il suffit de sortir un instant de l’intrigue pour que la laideur numérique nous apparaisse. Scott Lang (Paul Rudd) fait toujours le show du papa comme les autres, Hope (Evangeline Lily) a subitement perdue le seul dard qu’elle disposait et la jeune Cassie Lang (Kathryn Newton) est loin de la relève souhaitée. Quant à Michael Douglas et Michelle Pfeiffer, ils se demandent sans doute ce qu’ils font encore dans ce cabaret en toc et ils ne sont pas les seuls à prendre du recul sur la situation catastrophique d’un studio qui ne possède plus l’élan cinématographie d’antan, ou même plus récemment, des premiers « Pirates de Caraïbes ».
Et apparemment, il ne serait plus question de distiller la future menace des Avengers par le biais de scènes post-génériques, toujours aussi maladroits et insupportables. On a donc fait le choix de confronter cet ennemi, dont on connaît suffisamment bien les contours, afin qu’il laisse planer un suspense insoutenable. Le titan à la peau pourpre laisse place à un vilain plus tenace, plus terrifiant et plus cruel. Enfin, c'est ce qu'on retient des comics, car il n'y a pas de quoi être fasciné par ce Kang (Jonathan Majors), loin d'être le conquérant annoncé. Inutile de faire mention d’une tête flottante, tout ce qu’il y a de plus ridicule et appuyé pour nous soutirer un rire sincère. Ainsi, « Ant-Man : Quantumania » se moque pratiquement de lui-même de bout en bout et ne peut pas compter sur son déluge d’effets spéciaux pour rattraper le vide abyssal qui saisit ce démarrage de phase par la gorge. On échoue à créer une comédie familiale, un space opera ou à renouveler des enjeux essentiels pour les années qui suivront. L’épisode, censé nous faire plonger dans les arcanes du multivers, n’est pas près de rivaliser avec la sensibilité et l’audace d’un « Everything Everywhere All At Once », mais il serait mal placé de demander autant à une entreprise aussi refermée sur elle-même, n’ayant ni le ludisme ni les intérêts d’emprunter un tel virage pourtant évident.