Si la jeunesse a toujours eu une place importante dans l'animation japonaise, celle-ci a récemment d'un conditionnement quant à sa mise en avant au cinéma. La majeure parti d'entre eux restent les teen movie japonais, se déroulant au lycée et mettant en avant une période qui a marqué la majeure parti de la population japonaise (de par ses dogmes et la paradoxale liberté qu'on peut y trouver avant le passage à la vie d'adulte). Même s'il y a une recrudescence de jeunes enfants à l'écran dans le cinéma d'animation japonais, notamment avec l'émergence d'auteurs comme Hiroyasu Ishida (Le mystère des pingouins, Drifted Home), on voit encore que trop rarement des long métrages d'animation se recentrant autour de jeunes enfants, et la majeure parti d'entre eux restent des création tirés de licence télévisuel. Un film notable récent dans le genre reste Miraï ma petite soeur, chef d’œuvre absolu qui me retourne à loisir, qui avait passé une tête à la Quinzaine des réalisateurs, et qui fait parti des plus beau film que j'ai pu voir de ma vie. Depuis le passage de Miraï, plus aucun film d'animation n'a fait son entré en compétition à la Quinzaine des réalisateurs. La chose n'est pas tant surprenante quand on sait le nombre de places réservés à l'animation à Cannes. C'est donc avec une certaine attente que j’appréhende Anzu, chat-fantôme, sélectionné à la Quinzaine des réalisateurs 2024 dans une édition marqué par un retour en force de l'animation à Cannes (La plus précieuse des marchandises, Flow, Slocum et moi, Angelo dans la forêt sombre et mystérieuse, Sauvages, Silex and the city...), et en compétition officielle au Festival d'Annecy 2024 au côté de The Imaginary et Totto-Chan : La Petite Fille à la fenêtre, (eux aussi des films sur la jeune enfance japonaise, histoire de me donner tord le temps d'une année).
Le film a donc tout pour attiser l'attention, mais différents détails pouvaient rebuter. En effet, si le film part d'un postula assez fréquent dans le cinéma d'animation japonais et plutôt facile d'accès (on y reviendra plus tard), dans la même veine que des films comme La Maison des égarées, la réalisation a de quoi interpeller. Celle-ci est entièrement réalisé en rotoscopie, et cela ne se veut pas dans la demi-mesure. En plus de l'image qui se base sur un référent réel, le travail sonore est effectué en milieu réel depuis le plateau de tournage de la captation vidéo à la démarche d'un Linda veut du poulet, précédente réalisation de Miyu Production qui co-produit Anzu chat-fantôme. On obtient beaucoup plus de profondeur et de vivacité dans des scènes de la vie courante, surtout en intérieur, où l'on est plongé par le son et l'image dans un univers qui semble entre la réalité et un monde fantastique. Le design des personnages se retrouvent contraints de s'adapter au modèle et de décloisonner un style graphique, propre au studio Shin-Ei Animation, qui peut être étouffant (on y revient tout de suite). Le soucis étant que cette démarche rotoscopique vient beaucoup trop comme une coquetterie plus que par volonté narrative, et si j'ai pu dégager un parallèle sur la possibilité que peut avoir la rotoscopie de retranscrire le contact entre vivant et monde des esprits, c'est plus pour être gentil que par analyse spontanée. Le rapport entre imaginaire et réalité tient beaucoup trop autour des yokaï, dans une logique très simpliste de "démon VS humains", et la mise en scène du monde imaginaire ne permet pas de montrer un décalage significatif comparé au monde des humains. On a des références au Voyage de Chihiro, mais à force de mélanger ces références avec un aspect psychopompe "mort administrative" comme dans Coco (avec l'idée des morts et vivants qui doivent rester dans leurs mondes où ils peuvent avoir une fonction pour leurs communautés respectives), on finit par confondre les deux mondes qui, de par les références qu'elles déploient, sont voué à être exactement les mêmes. Cela devient un vrai soucis lorsque le dispositif ne fonctionne pas et que l'on se retrouve avec des scènes qui sont franchement moche. Le film étant une réalisation du studio Shin-Ei Animation, au style très abstrait et épuré, le mariage entre la rotoscopie et le dessin très enfantin ne fonctionne pas et on passe notre temps à remettre en question notre suspension d'incrédulité. Cela n'est pas aidé par une animation et un dessin pas très propre se rapprochant parfois du niveau de dessin de Shin-chan, reprenant sans modernisation certain design trait pour trait de la série... qui a plus de 30 ans. On a cette sensation de renfermé et de vieux quand on voit certaines aspérités qui avaient un charme dans les années 1990, mais qui ici font négligé et brouillon tant cela s'additionne aux nombreux défauts liés à la rotoscopie qui, elle-même, n'est pas réussite. Certains plans fixe avec des personnages en mouvement laissent trop entrevoir le film derrière la rotoscopie, les plans axés sur le jeu des personnages sont très incertains façon Totally Spies des premières saisons (et pas les épisodes les plus réussit) et, même au niveau du découpage et du montage, certains enchainements (et l'absent de certains plans de transitions) laissent trop transparaitre les spécificités du plateau de tournage. C'est dommage car, malgré un résultat très bancale dans sa retranscription en animation, le film laisse entrevoir des éléments intéressants qui laissent penser que la captation en prise de vue réelle peut tout aussi bien suffire, nous laissant perplexe face à l'utilité d'animer l'ensemble.
La narration, quant à elle, est très convenu et devient très vite insignifiant tant le récit ne met pas assez en danger ses personnages, et ne va pas bousculer outre mesure les conventions. Le côté sulfureux et hors des conventions qu'on peut attendre d'un personnage comme Anzu n'est pas assez mis en avant, et la confrontation avec l'adolescence de Karin n'arrive jamais. De l'autre côté, les codes de l'enfant pré-adolescent écorché vif sont finement joué, dans une volonté de naturel et d'épure, et on arrive à bien apprécier le personnage de Karin. Le soucis étant que, dans une volonté de confrontation des tempéraments qui n'a pas tant lieu d'être, le personnage va adopter une posture hautaine et mal aimable qui a son charme lorsqu'elle interagit avec les deux garçons, mais qui finit à rimer à rien lorsqu'elle s'en prend cruellement à Anzu sans bonne raison. On s'emmerde sec face à des personnages beaucoup trop sages pour prendre des initiatives, beaucoup trop attachés à une routine peu captivante où chacun ne trouve pas quoi faire pour occuper ses journée, et on attend un dénouement plein de maturité maturité qui se ferra beaucoup trop attendre. Celui-ci sera beau et plutôt touchant, dans une forme de simplicité et d'honnêteté à la Mon Voisin Totoro que l'on aurait aimé retrouver bien avant. Mis à part cela, on n'aura que des flatulences beaucoup trop présentes et insistantes, destiné à je ne sais quel public au vu de la démarche d'ensemble.
Anzu Chat-fantôme est mignon, pas tant désagréable malgré sa maladresse, mais beaucoup trop bancale pour nous emmener quelque part. Ne racontant pas grand chose et donnant l'air de ne pas savoir quoi raconter, le film se perd entre les différentes références qu'il invoque, dans sa forme et son fond, et n'arrive pas à concrétiser un beau projet qui aurait gagné à être mieux réfléchit.
8,75/20
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