Il y a une certaine logique mercantile, après l’espace de Gravity et l’océan d’All is lost, à voir désormais débarquer sur nos écrans un survival se situant dans un climat glacial. Pour autant, il faut reconnaître qu’Arctic, en se tenant strictement à des enjeux d’une grande sécheresse (en gros, se rendre du point A au point B sans mourir), fait montre d’une certaine efficacité ; voire en certains endroits d’une vraie beauté brute, qui passe autant par le personnage interprété par Mads Mikkelsen que les paysages naturels, époustouflants.

Que l’acteur Danois, décidément trop rare, porte le film sur ses épaules n’est pas une surprise : l’héroïsme modeste d’Overgård lui va comme un gant, lui qui, même dans ses rôles les plus tordus (au hasard, Le Chiffre dans Casino Royale) a toujours été adepte d’une certaine retenue. Arctic est aussi l’occasion de constater que, par le biais du calvaire subi par ces personnages livrés à eux-mêmes dans des conditions extrêmes, le plaisir ressenti à la vision de ce nouveau type de films d’aventures tient à cette idée que la nature se venge, en quelque sorte, sur ce que lui fait subir l’être humain depuis des décennies. Bien sûr, il s’agit aussi de magnifier l’ingéniosité, le courage, la détermination de l’Homme. Mais au-delà des démonstrations de force, de la sublimation du dépassement de soi, le survival en milieu hostile porte en lui un message évident qu’il est agréable d’entendre par les temps qui courent : on se doit de plier le genou face à notre hôte Mère Nature.

Dans ce sous-genre qui a le vent en poupe, on est aussi emporté par la charge mélancolique d’une lutte à la vie à la mort d’un être humain dont on ne sait rien et dans lequel chacun est libre de se projeter (et donc de s’identifier) à loisir. La seule trace lyrique d’Arctic passe par le compositeur Joseph Trapanese, qui parvient, par ses cordes sombres et oppressantes, à retransmettre parfaitement la foule de sentiments (espoir, abattement, peur, colère…) liés à la situation de ces personnages condamnés à aller au bout d’eux-mêmes, au bout du monde.

Francois-Corda
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le 8 août 2019

Modifiée

le 24 mai 2024

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François Lam

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