Taisto Kasurinen (Turo Pajala) se retrouve au chômage. Les premiers plans montrent la fermeture définitive de la mine où il travaillait. On le voit ensuite dans un café. Le vague à l’âme, il discute avec un homme de ses connaissances. L’homme lui conseille de ne pas se laisser abattre. Avant de se rendre aux toilettes, il lui conseille néanmoins de ne pas suivre son exemple…
Pour retrouver du travail, Taitsuo va semble-t-il jusqu’en Allemagne, puisqu’il reçoit une paye en marks sur un chantier naval. Un salaire de misère qui l’amène à envisager de vendre son unique bien, une grosse voiture décapotable qu’il gare sans précaution. Cela lui vaut un PV qu’il tente de faire sauter. L’aubergine (Susanna Haavisto) est une rouquine quelque peu désabusée qui, contre toute attente, envoie valser son carnet à souche et sa coiffe contre la promesse d’un bon repas dans la foulée. Au restaurant, on ne verra que les mains du cuistot présentant deux assiettes fumantes sur un guichet à guillotine, juste avant que celle-ci tombe assez brusquement. Après ce repas, la caméra cadre le couple dans la voiture et on apprend que la rouquine est divorcée et vit avec son garçon. Sans le moindre geste romantique et avec un minimum de paroles, Taitso est invité à monter puis à rester, ce qui lui convient parfaitement.
A la suite d’une embrouille, Taitso se retrouve en prison à partager sa cellule avec un homme aux allures de monsieur Tout-le-monde parfaitement inoffensif, qui va le tester puis lui révéler, tranquillement, qu’il a été condamné pour meurtre…
Malgré une succession de situations plombantes et même dramatiques, Aki Kaurismaki réussit, sur un faible minutage (1h09), à trouver un inimitable ton rocambolesque. Le film est parfaitement dans son style, avec une action qui avance l’air de rien, une ambiance mélancolique soulignée par une BO adaptée et des décors tristounets où il s’arrange régulièrement pour faire ressortir des éléments dans des couleurs vives. Les personnages ont tous l’air de pauvres hères se demandant ce qu’ils ont fait pour mériter cette vie impossible. Par moments, on se dit quand même que Kaurismaki filme sur le fil du rasoir, avec son réalisme teinté de poésie émaillé de scènes incroyablement statiques. Mais on sent toujours un regard bienveillant sur les personnages. Et surtout, le plaisir de filmer est palpable. La vie est difficile ? Et alors, avec le cinéma on peut tout imaginer, même un improbable happy end. Ce film n’est pas un chef d’œuvre, mais c’est un bel échantillon du talent de son réalisateur. Kaurismaki se paye le luxe de traiter de manière très personnelle du chômage et de ses conséquences, de l’amitié et de l’amour, de la cellule familiale, de l’ambiance en milieu carcéral et surtout de l’absurdité de l’existence, tout cela avec un mélange inimitable de nonchalance et de légèreté (et ce malgré l’attitude désabusée de sa galerie de personnages tous laconiques).
Conclusion (souvenir d’une vieille série de spots publicitaires) :
- Vous échangeriez votre baril d’Ariel contre deux barils de cette lessive anonyme qui lave plus blanc ?
- Pas question, je garde mon baril d’Ariel qui donne un éclat incomparable à mes couleurs.