Bien sûr, ce film parle d'inégalités, d'injustice, de racisme, de néolibéralisme, de la société américaine et tout ce qu'elle a de critiquable à ces niveaux. L'erreur, selon moi, serait de ne comprendre ce film que sous ce prisme, en omettant son thème central : notre réaction face à l'expression de ces fléaus.
Ma note s'explique bien sûr par ma sensibilité particulière à ce thème, cette question que je ne qualifierais pas moins d'existencielle.
Cela dit, la force de ce film est de l'aborder par l'oeil de l'enfant, qui fait face pour la premiere fois à ce qu est la discrimination et ne sait pas encore comment y réagir mais il sait pourtant mieux exprimer ce ressenti que certains des adultes qui l entourent. Son attitude résume tout le paradoxe de ces situations : aller contre soi car c'est être humain.
Cette découverte, qui est le thème central du film se matérialise par un fil rouge : le dialogue émouvant de Paul avec son grand-père, dont la figure droite et intransigeante face à l'injustice, si elle peut paraître cliché, permet au réalisateur de présenter les comportements de l'ensemble des autres personnages de cette fresque familiale, à la fois intime et universelle, dans une grande subtilité.
Malgré la scène finale qui resone comme un acte de libération et d'espoir, la tonalité reste pour moi tragique, comme le basculement d'une société vers une apathie et une acceptation de l'injustice (raciale en premier lieu), au mépris du passé et des enseignements de l histoire.
Finalement, Paul Graff est le seul a comprendre son grand-père, les autres membres de la famille (le père et la grand-mère en particulier), acculés par les normes qu'ils ont besoin de suivre pour exister dans cette société aussi antisémite, finissant par adopter l'attitude rejetee par ce grand-père alors même qu'ils cherchent constamment à s'en approcher.
Ce moment de basculement se situe dans les années 80 et le film réussit parfaitement à soutenir son propos sur le fond par une réalisation classique mais léchée, située historiquement, presque enfantine comme pour faire echos au point de vue de Paul.
Enfin le jeu d'acteurs est excellent : Anthony hopkins parfait dans ce rôle et surtout, un jeu des enfants absolument bluffant de subtilité et de détail dans l expression des émotions et réflexions que l'on peut avoir à cet âge.
Un quasi sans-faute.