Dès l'intro on voit un personnage coiffé d'un chapeau, visage dissimulé, s'aidant de béquilles s' avancer lourdement vers l'écran. La gravité est déjà installée, et elle se déplace vers le spectateur. On est dans le film-noir.


Billy Wilder est un auteur extrêmement doué pour instiller une ambiance et pour donner du coffre et de l’épaisseur à ses personnages. Il est l'un de ceux qui ont construit l'essence même du film-noir, pendant Freudien et métaphysique du film policier.


Ici pas de détective privé Bogartien, ni de gangsters fumeurs de cigare, c'est dans le monde des courtiers en assurance que Wilder tisse son intrigue.
Pourtant tous les poncifs sont là. La femme fatale interprétée par une Barbara Stanwyck magnétique et d'une grande sensualité. La voilà teinte en blonde, sorte de faux-semblant qui présage immédiatement le fait qu'elle joue un double jeu. Elle porte une chaîne à la cheville, qui indique qu'elle est open. La séduction comme moyen d'arriver à ses fins.
La présence d'Edward G. Robinson, l'un des parangons du genre, avec sa gestuelle unique et son phrasé caractéristique.
Et le héros interprété par Fred MacMurray, un autre acteur typique de cette époque bénie du cinéma américain, le mâle classieux et séducteur.
Le noir et blanc, bien sûr, les jeux d'ombre, les clairs/obscurs. Les jeux de séduction, les fumées de cigare, les belles femmes, les héros bien sapés et le jeu des faux-semblants et des impressions tronquées. Tout y est...


En plus d'un parfait dosage dans les descriptions méthodiques , de cette manière unique d'enchaîner les scènes avec à chaque fois le raccord qu'il faut, Billy Wilder réussit à implanter une sorte de fatalisme immédiat. Pas question de raconter des histoires, on sait où on va et ça coule de source. L'essence du film-noir, son carburant.


L’ambiguïté des personnages évidemment est également une caractéristique de ce cinéma stylisé dont l'image est un acteur essentiel, l'image que nous donne les personnages, mais également leur reflet dans le miroir-écran où le spectateur est pris comme témoin.


Un grand film d'un auteur essentiel de l'histoire du 7ème art.

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le 15 mars 2016

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