« Nous sommes en 50 avant Jésus-Christ ; toute la Gaule est occupée par les Romains… Toute ? Non ! Car un village peuplé d’irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l’envahisseur. »
Agacé par cette interminable ténacité, Jules César décide de mettre sur pied un plan infaillible: puisque ses armées sont incapables de vaincre les Gaulois par la force, c’est la civilisation romaine elle-même qui séduira ces barbares. Il fait donc bâtir à côté du village un domaine résidentiel luxueux destiné aux civils romains : « Le Domaine des Dieux ».

Cette fois, pas de Pierre Tchernia pour planter le décor puisqu’après un prologue nous exposant les sombres desseins de César puis un générique en ombres chinoises qui n’est pas sans rappeler celui du Tintin de Spielberg, nous sommes rapidement propulsés en Armorique, en pleine chasse au sanglier aux côtés d’Astérix et Obélix.
Et la première chose qui nous baffe est la beauté de l’ensemble, le passage à la 3D de nos personnages favoris se fait sans heurt et leur côté rondouillard rend justice à l’œuvre de Goscinny et Uderzo.

Passé ce premier constat rassurant, les voix de nos deux moustachus se font entendre et c’est un véritable bonheur d’assister au retour de Roger Carel pour doubler le petit blond au casque ailé ! Cette voix devenue indissociable d’Astérix nous renvoie en enfance, aux plus belles heures de l’œuvre animée dont les chefs-d’oeuvresques Douze Travaux font partie.
Plus déstabilisante, la voix d’Obélix ne ressemble pas à celle des précédents comédiens mais il suffira de quelques minutes d’adaptation pour saluer l’excellent travail de Guillaume Briat.

Et de travail, parlons-en, car c’est un boulot titanesque qui a été abattu par le réalisateur Louis Clichy et son co-réalisateur et scénariste Alexandre Astier. Si on ne présente plus ce dernier depuis Kaamelott, le premier n’est pas en reste puisqu’il avait déjà mis son talent au service de Pixar sur Wall-E et Là-Haut, excusez du peu.

Le long métrage a donc été dans un premier temps doublé par le casting de Kaamelott, accompagné du grand Carel mais aussi de guests comme Laurent Lafitte ou Florence Foresti, puis animé pour coller au plus près à la prestation des acteurs. Un résultat du plus bel effet puisqu’aucun comédien ne fait de l’ombre à son personnage.

Par ailleurs, si nous pouvions craindre que l’esprit de Kaamelott ne pèse trop lourdement sur les frêles épaules d’Astérix, il n’en est rien puisque le valeureux Gaulois est bien le grand héros du film et le respect pour Goscinny n’avait plus été aussi présent à l’écran depuis près de 30 ans (Mission Cléopâtre est un généreux divertissement mais reste une orgie des Nuls plutôt qu’un vrai hommage à Astérix lui-même).

Ainsi, l’humour d’Astier se marie parfaitement à l’avant-gardisme de la BD (de 1971 !) pour nous régaler de ses joutes verbales bien ciselées, souvent basées sur des quiproquos et autres incompréhensions entre personnages, et ajoutant de la tension aux enjeux dramatiques quand il est nécessaire de faire progresser l’intrigue, le tout avec la petite pointe d’absurde qui a toujours fait le charme de cette œuvre intemporelle.

Mais cette adaptation tomberait rapidement dans l’oubli si elle se contentait de coller au plus près à la BD, c’est pourquoi Clichy et Astier ont mis un point d’honneur à prolonger un peu le périple en poussant plus loin les thématiques déjà présentes sur papier, à savoir la mondialisation et la perte d’identité, des sujets très actuels qui méritaient donc qu’on leur apporte plus de substance, c’est désormais chose faite avec cette prise de risque qui renforce considérablement l’édifice narratif de cette belle aventure.

Et que serait un épisode d’Astérix sans référence à la culture populaire ? Là encore, l’équipe frenchy ne s’y trompe pas et le fim foisonne de clins d’œil nous faisant sourire ; du Seigneur des Anneaux à King Kong, en passant par l'inévitable Kaamelott et d’autres albums gaulois, les petits plaisirs coupables demeurent savoureux sans être envahissants.

Néanmoins, malgré un travail d’équilibrisme absolument brillant, il faut signaler que toutes les boutades ne sont pas hilarantes et que les enfants se réjouiront plutôt des gags visuels que du reste, même si l’héroïsme des personnages principaux devrait gagner leur cœur sans aucun mal.
De plus, si la musique est plutôt jolie et accompagne l’image avec brio, aucun véritable thème ne nous restera en mémoire comme ce fut le cas avec nos bons vieux dessins animés armoricains.

Quoi qu’il en soit, Astérix : Le Domaine des Dieux est un bijou d’animation qui transpire la passion pour l’œuvre d’origine et qui témoigne que, s’il s’en donne les moyens, le savoir-faire franco-belge n’a rien à envier aux grosses machines américaines (qui nous ont tout de même bien gâtés cette année avec Dragons 2).

On voudrait tellement revoir cet Ast(i)érix là contrecarrer d’autres projets insidieux de Jules César, par Toutatis !
christophe1986
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le 20 déc. 2014

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christophe1986

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