Déprécié par une bonne partie de la populace (y compris de la communauté disneyphile), Atlantide, l'empire perdu a pourtant quelques qualités méritantes.
Pour commencer le film ne propose pas une énième romance à l'eau de rose farcie de bons sentiments ou de réflexions égocentriques, en dépit de son duo de réalisateurs à qui l’on doit entre-autre La Belle et la Bête et Le Bossu de Notre-Dame : en effet, il est ici question d'une toute autre aventure, celle de la découverte d'une civilisation dont on connait tous plus ou moins l'histoire.
Influencé par un panel d’œuvres variées, allant des romans de Jules Verne à l'anime Nadia, le secret de l'eau bleue, Atlantide propose une alternative intéressante au mythe de la cité engloutie : au début du XXème siècle, une expédition financée par un vieux milliardaire excentrique, composée des meilleurs experts et équipée d’un arsenal futuriste, s’enfonce dans les profondeurs, loin de se douter de ce qui les attend… Un scénario digne d’un film d’aventure old school, qui aurait peut-être séduit plus de monde s’il avait été tourné en live-action. Allez savoir.
Toujours est-il que l’exécution est honnête est plaisante. On y trouve une ambiance et quelques thèmes inhabituellement sombres, parmi lesquels une civilisation antique sur le déclin, une lignée royale sacrifiée au fil des siècles par une entité surnaturelle en contrepartie de la survie de son peuple, un antagoniste (pas si) inattendu et plus complexe que d'ordinaire dont la brutalité n'a d'égale que la cupidité, un peu de sang (une rareté, depuis Taram et le Chaudron Magique)...
Mais surtout, c'est sans doute LE grand classique le plus meurtrier de l'histoire du studio, nous offrant des scènes de mort ou les victimes se comptent par centaines voire par milliers en un temps record et ce dès ses deux ouvertures
Oui, je précise bien "deux" ouvertures car il existe un prologue originaire devenu scène coupée où l'on fait la connaissance d'une bande de Vikings qui aurait mieux fait de rester en Islande
sans oublier le sort atroce que connait la quasi-totalité de l'équipage de l'Ulysse dans une indifférence presque glaçante.
Ce ne sont pas là les seuls écarts avec le sempiternel et convenu cahier des charges : un anti-héros intello et maladroit doublé dans ses deux versions par l'interprète de Marty McFly, des seconds rôles variés, déjantés et hauts en couleurs (mention spéciale à la poétique Madame Placard et au sentimental « Enzo Demolition »), un bon petit lot de répliques cultes en lesquelles on reconnaît la patte de celui qui écrira quelques années plus tard les dialogues d'Avengers et surtout (!) une princesse digne de ce nom, exotique et rafraîchissante, qui pour une fois ne se contente pas de tout miser sur sa plastique — même si celle-ci n'a rien à envier à celles d'Ariel ou de Pocahontas — ou sur sa délicatesse (loin s'en faut !).
Malgré un coup de crayon parfois un peu bâclé, le film s'en tire à très bon compte sur le plan visuel en particulier grâce aux objets animés en 3D: ainsi, un submersible de plusieurs centaines de mètres, un monstre marin mécanique maousse, une montgolfière titanesque ou encore des géants de pierre antédiluviens s'incrustent à merveille dans de superbes décors parmi lesquels les fonds marins, les entrailles de la Terre ou la mythique citée perdue elle-même. La plongée du sous-marin, l'attaque du Léviathan et l'éruption volcanique figurent parmi les scènes les plus impressionnantes.
Mais la carte maîtresse du film est sans nul doute la musique de James Newton Howard, qui accompagne, intensifie et sublime l'aventure jusqu'à son paroxysme : le désormais culte thème The Crystal Chamber, que l'on aura le privilège d'entendre dans pas moins de deux scènes aussi spectaculaires visuellement que satisfaisantes auditivement.
Autant de choses qui valent que je range ce film dans la case « souvenirs d’enfance/adolescence intouchables ».