Dans cette critique, je me contenterai d'évoquer les qualités formelles du documentaire, et je ne m'étalerai pas sur l'objet abordé. Il est en effet évident que la situation des sans-abris est tragique, révoltante, indigne. Cela devrait être une priorité politique et la première qualité du film de Claus Drexel est d'en parler, tout simplement.
Mais plus qu'en parler, Drexel le fait bien. La photographie de Paris, la nuit, à travers les saisons, est tout simplement magnifique. Les plans fixes sur les hommes et les femmes interviewées sont toujours infiniment soignés.
Les interviews aussi sont très réussies. La place laissée au silence, aux blancs, aux regards, à l'hésitation et à l'émotion est absolument bienvenue. L'intervieweur parle assez peu, et heureusement, puisque le plus gros défauts de ces portraits sont les questions posées : celles qu'on entend, en tout cas, sont plates, niaises, superficielles.
Je tiens à mentionner tout particulièrement le générique de fin, qui permet non seulement de mettre enfin des noms sur les visages côtoyés pendant 1h30, mais aussi de livrer une interprétation bouleversante de la chanson "Nessun dorma" de Luciano Pavarotti. La conclusion sur l'aube, mêlant les paroles de l'opéra à l'image, avec un soupçon d'espoir politique, pourrait mettre les larmes aux yeux...