Chez William A. Wellman tout est une question de juste dosage...

Souvent injustement mis de côté au profit des trois grands géants du cinéma classique Hollywoodien que furent John Ford, Howard Hawks et Raoul Walsh, William A. Wellman n’a absolument rien à leur envier dans l’emprise immédiate qu’à son style sur tout amateur de cinéma total. Chantre de l’épure, du peu qui montre beaucoup, et du plan séquence intense et riche, il est parvenu à construire une filmographie qui talonne aisément les trois autres monstres sacrés.


Revoyez son Story Of G.I. Joe, que Samuel Fuller considérait comme le plus grand film de guerre jamais réalisé, je suis assez d’accord avec lui…, ainsi que ses grands films dans divers genres, Western, aventure, film-noir, il a écumé les différents mouvements du cinéma d’exploitation américain avec toujours ce souci du perfectionnisme dans l’image, ce sens du rythme et un vrai regard de cinéaste capable de se poser en penseur de l’évolution de la société américaine, il lui a offert quelques chefs d’œuvres incontournables.


Voilà, après ce petit aparté personnel, revenons à cet Across The Wide Missouri, au titre qui ouvre des perspectives infiniment grandes, comme les immenses territoires de l’Amérique. La maestria de Wellman consiste à mettre beaucoup de choses dans un plan et ce de fait le rendre vivant au-delà de la simple action qui apparaît toujours, mais jamais de trop-plein, un juste dosage. Il y a des trappeurs, des indiens, une magnifique squaw aux yeux de diamants, des bagarres au coin du feu, l'éternel petit vieux cocasse et pitoresque, des petits tracas, de la violence subite et très peu de concessions, le happy-end est une denrée rare chez Wellman...


C’est du cinéma total, très bien photographié, des paysages de toute beauté, un héros mal rasé, indémodable Clark Gable, l’héritier direct de tous les Indiana Jones de la terre…, et c’est extraordinairement bien orchestré par un maître du juste équilibre entre action et moments plus en suspend, où l'image prend le pas sur tout le reste, mais c'est également un cinéma qui sait se poser et devenir presque mystique dans sa théorisation des petits moments intimes, n'omettant jamais d'agrémenter ses œuvres de petites confidences électrisantes où les êtres se livrent à l'intime : « ce que je veux te dire, tu ne le comprends pas encore, et je ne comprend pas encore ce que veux me dire, ça viendra bien vite. Pour moi tu es la seule femme qui existe » … comment faire plus romantique et sensuel… ?


En résulte 75 minutes de cinéma pur. Quand beaucoup ont besoin de trois heures pour filmer du vide...

philippequevillart
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le 10 mars 2019

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