Second film que je découvre de l'inclassable Quentin Dupieux, « Au poste ! » confirme tout l'attrait que j'ai pour le cinéma de ce monsieur, même s'il s'agit, visiblement, de ses deux titres les plus accessibles (l'autre étant « Le Daim »). Sur un scénario rappelant énormément le concept de « Garde à vue », le réalisateur s'offre une comédie complètement barrée, où il joue aussi intelligemment de son décor que de l'affrontement entre policier et suspect, où le raisonnement de chacun oscille constamment entre habileté et grande stupidité.
Ça a l'immense mérite de rendre le récit régulièrement imprévisible, notamment grâce à une écriture de haut vol aussi bien dans les dialogues que le rapport au temps et à l'espace orchestré par Dupieux. Difficile de résister à tous ces échanges surréalistes amenant parfois vers des sommets d'absurde, porté par un duo Benoît Poelvoorde - Grégoire Ludig exceptionnel, notamment le premier : du très, très grand Poelvoorde).
Certains passages sont hilarants (notamment lorsque l'inspecteur se moque de l'inintérêt de l'histoire racontée par son interlocuteur), et alors qu'on ne s'y attend vraiment pas, le réalisateur décide de jouer avec le temps, l'espace, les souvenirs, brisant totalement les conventions inhérentes au genre pour provoquer un décalage constant, difficile à décrire sans vous spoiler quoi que ce soit.
L'occasion, également, de proposer une réflexion assez maligne sur l'art cinématographique, ses artifices, les possibilités infinies offertes par le monde du spectacle et ce que chacun peut en faire. Je suis un tout petit plus dubitatif sur la (double) fin, certes totalement dans cet esprit mais poussant un bouchon qui avait été déjà très loin. Qu'importe, tant cette œuvre à la fois totalement originale et ultra-référencée confirme le statut hors-norme de cet auteur inclassable, dont l'univers foisonnant n'a clairement aucun équivalent en France. Longue vie à lui.