J'avais adoré le livre, et il était peu dire que j'attendais beaucoup de cette adaptation signée Albert Dupontel, ravi que celui-ci ait enfin un projet de grande ampleur à mener. Résultat : une satisfaction, malgré une légère pointe de déception. C'est toujours le risque lorsque vous connaissez le roman : faire le jeu des comparaisons en sachant (surtout avec une durée aussi « courte ») que certains aspects adorés du roman seront quasiment absents ici, tout comme certains personnages, à peine esquissés. D'où une légère frustration, ce qui n'empêche pas le réel plaisir ressenti tout du long.


Ces deux heures passent à la vitesse d'une balle, à la fois très fidèles au roman (sans doute parfois pas assez développés dans certaines scènes clés (notamment celle d'ouverture, immersive au possible)), tout en étant empreint d'une vraie identité visuelle, dans les couleurs, les costumes, la reconstitution, l'humour, la personnalité de Dupontel apparaissant constamment, notamment à travers plusieurs moments faisant appel à l'enfance, au jeu, au déguisement (superbe travail sur les masques), pour le coup de manière presque plus poussée que dans le roman. Et puis il n'y a pas à dire : même si celle d'origine est plus riche, lorsque vous avez un tel matériel de base pour travailler, difficile de vous louper totalement.


Le résultat est moins corrosif, provocateur que ne pouvait l'être le prix Goncourt, mais on retrouve un minimum ce ton, ce discours pas franchement conformiste, ce regard différent de celui que l'on peut avoir sur la Grande Guerre, avec sa galerie de personnages étonnants, brillants, hauts en couleur, parfois émouvants, que l'on retrouve avec bonheur le temps d'une séance, d'autant que l'interprétation, sans être exceptionnelle, est globalement à la hauteur de l'événement (à l'image de Laurent Lafitte). Le réalisateur se permet quelques rares modifications, plutôt bénéfiques pour l'intrigue et l'émotion. Je n'ai pas été entièrement conquis, certains choix m'ont paru étonnants, mais au vu de ce que nous propose le cinéma français depuis de très nombreuses années, une œuvre ambitieuse, empreinte de lyrisme et de politiquement incorrect (un peu), cela ne se refuse pas : à vous de voir maintenant si vous souhaitez privilégier le superbe roman ou ce film, car selon ce choix, votre regard risque sensiblement de ne pas être le même.

Créée

le 13 juin 2018

Critique lue 256 fois

3 j'aime

Caine78

Écrit par

Critique lue 256 fois

3

D'autres avis sur Au revoir là-haut

Au revoir là-haut
Subversion
4

Adieu

À vrai dire, je n'avais même pas envie d'écrire sur ce film, qui ne m'intéresse pas outre-mesure. Mais voyant une déferlante de critiques élogieuses, j'ai quand même eu envie d'apporter un...

le 28 oct. 2017

109 j'aime

21

Au revoir là-haut
Sergent_Pepper
6

Les rentiers de la gloire

Il a toujours été délicat de catégoriser de manière précise le cinéma d’Albert Dupontel. Si la comédie domine, le grotesque y côtoie souvent les grincements de la satire, et le baroque formaliste s’y...

le 3 nov. 2017

97 j'aime

14

Au revoir là-haut
Gwynplain
5

Les méchants sont pas gentils parce qu'ils sont très méchants

Les spectateurs français attendaient un film de ce genre depuis tellement longtemps qu’ils n’osent pas bouder leur plaisir : enfin un film ambitieux où les 17 millions d’euros de budget se voient à...

le 31 oct. 2017

79 j'aime

22

Du même critique

Enquête sur un scandale d'État
Caine78
2

Enquête sur un scandale cinématographique ?

Thierry de Peretti est un réalisateur doté d'une bonne réputation, notamment grâce à « Une vie violente », particulièrement apprécié à sa sortie. J'y allais donc plutôt confiant, d'autant que le...

le 20 août 2022

32 j'aime

8

Mourir peut attendre
Caine78
4

Attente meurtri(ère)

Cinq ans d'attente, avant que la crise sanitaire prolonge d'une nouvelle année et demie la sortie de ce 25ème opus, accentuant une attente déjà immense due, bien sûr, à la dernière de Daniel Craig...

le 7 nov. 2021

29 j'aime

31

L'Origine du monde
Caine78
3

L'Origine du malaise

Je le sentais bien, pourtant. Même si je n'avais pas aimé « Momo », adapté du même Sébastien Thiéry, cela avait l'air à la fois provocateur et percutant, graveleux et incisif, original et décalé,...

le 25 sept. 2021

24 j'aime