Les trois mères
Trois mères vivant des grossesses et des contextes amoureux bien différents : Cecilia, une belle femme mûre qui relève d’une fausse couche et dont le mari plutôt froid ne semble pas atterré par la...
Par
le 9 août 2019
1 j'aime
Au seuil de la vie, petite pépite de Bergman située intégralement dans une maternité, avec le lot d'affres que représente le milieu hospitalier. Du haut de ses modestes quatre-vingts minutes, le film fait comme un écrin à la sensibilité hors-normes du réalisateur. Sérieusement, quel genre d'homme est capable de faire un film entier autour du thème de la grossesse, de la fausse couche et de l'accouchement ? Quel genre de tête faut-il avoir pour savoir si bien capter les tourments de l'esprit qui accompagnent ces tourments des entrailles ? Et qui suis-je pour dire que c'est réussi ? J'ai au moins la réponse à cette question : je suis un spectateur comblé.
Il peut paraître bizarre que je dise avoir adoré voir trois femmes souffrir pendant plus d'une heure, sans cadre modérateur – les infirmières et les médecins sont humains, mais professionnels aussi. Leurs personnages sont si bien écrits qu'il ne viendrait à l'idée de personne de s'y raccrocher pour se sentir mieux. Mais l'œuvre est si pleine d'empathie qu'on s'en fiche. Bergman était plus humain que l'humain, et son humanisme transpire tant que cela rend sa création confortable.
La caméra est peu mobile, mais le réalisateur fait corps avec elle. Rarement un réalisateur a-t-il été acteur de son film sans jamais y apparaître ! Je vais me permettre une incise technique dans le lyrisme de ma critique (il faut bien justifier le rarissime 10/10 !) : un procédé plutôt rare à l'époque est largement utilisé pour illustrer la cause (B) de l'expression des personnages (A). Il s'agit du montage ABA, sans mauvais jeu de mots sur le fait que le film est suédois : on voit l'expression, puis sa cause, puis l'expression de nouveau. On croirait que c'est utilisé pour préserver au maximum le jeu surhumain des interprètes féminines, dont les monologues sont parfois longs et chargés d'émotions fortes. Encore une touche de la sensibilité à la Bergman ?
Et puis la deuxième lecture ne laisse rien au hasard non plus. Il m'est venue une comparaison très forte que je ne dois qu'à Bergman, même si sa suggestion n'en était pas voulue : j'ai vu ces femmes dans leurs chambres d'hôpital comme des condamnées à mort, parce que la vie les quitte littéralement lorsque se produit l'accouchement, que les conditions soient normales ou non. Et j'ai vu leur courage plus clairement qu'un blockbuster américain me le suggérera jamais.
Je n'irais pas jusqu'à dire que le film est agréable à voir (il nous met presque devant un dilemme : est-on captivé par la beauté ou la morbidité ?), mais s'il y a bien un film qui prouve que le génie peut créer spontanément le plaisir d'un visionnage, c'est bien celui-ci.
Créée
le 5 juil. 2018
Critique lue 326 fois
D'autres avis sur Au seuil de la vie
Trois mères vivant des grossesses et des contextes amoureux bien différents : Cecilia, une belle femme mûre qui relève d’une fausse couche et dont le mari plutôt froid ne semble pas atterré par la...
Par
le 9 août 2019
1 j'aime
Traiter le sujet si féminin de la maternité sous tout ses angles avec autant de finesse psychologique, ça ne pouvait être fait que par une femme supposait-on....Et bien non, c'est bien un homme qui...
Par
le 14 déc. 2013
1 j'aime
1
Il est certain que ce qui procure à Ingmar Bergman son génie c'est sa sensibilité. ( Entre autres ) Il est capable de mettre en scène des personnages tous aussi différents les uns que les autres , et...
Par
le 25 sept. 2020
Du même critique
Quand on m’a contacté pour me proposer de voir le film en avant-première, je suis parti avec de gros préjugés : je ne suis pas un grand fan du cinéma japonais, et encore moins de films d’horreur. En...
Par
le 26 oct. 2018
8 j'aime
(Pour un maximum d'éléments de contexte, voyez ma critique du premier tome.) Liu Cixin signe une ouverture qui a du mal à renouer avec son style, ce qui est le premier signe avant-coureur d'une...
Par
le 16 juil. 2018
8 j'aime
1
Si vous entendez dire qu'il y a Cluzet dans ce téléfilm, c'est vrai, mais attention, fiez-vous plutôt à l'affiche car son rôle n'est pas grand. L'œuvre est aussi modeste que son sujet ; Ledoyen porte...
Par
le 25 août 2018
7 j'aime
3