Après un premier opus introductif, programmatif, et parfois un peu bavard, Baby Cart 2 lance la série sur les rails de l'excellence.
Pourtant le début du film est très posé, avec notamment une séquence contemplative quasiment hallucinatoire lorsque père et fils prennent un bain ensemble. Le temps s'étire, des sons de cloches rythment étrangement la scène, et la caméra tourne sans fin entre les deux personnages face à face.
Après ce passage singulier rempli de tension, qui démontre à la fois l'acuité des sens du héros, sa symbiose avec l'univers et avec son fils, le rythme s'accélère sensiblement. Le film devient alors frénétique, presque fou, et enchaîne les morceaux de bravoure, entre combats expéditifs et sanglants, ennemis iconiques et duo de héros complémentaire et redoutable (car désormais le fiston prend part à l'action, d'une façon inattendue et jubilatoire).
Certaines scènes sont des sommets de cinéma baroque (les femmes ninja, les sbires planqués sous le sable dans le désert), et les combats sont encore plus gores et délirants que dans le premier opus. Côté mise en scène Misumi continue d'alterner entre science du cadre toute nippone et expérimentations visuelles, avec plus de bonheur encore.
Le scénario met le héros aux prises avec de nombreux adversaires de tous bords, qui voient en lui l'homme à abattre, tandis que celui-ci se considère comme déjà mort ; toutefois la relation qu'il entretient avec son fils ne peut que toucher par sa profondeur. Si les mots d'Itto paraissent durs et dénués de sensibilité, les actes du père envers l'enfant, et de l'enfant envers le père sont parfois très touchants. De même, au sein des scènes les plus violentes peut jaillir la poésie, comme lors du dénouement du combat final.
Les trois adversaires principaux d'Ogami Itto forment d'ailleurs un trio inoubliable et rendu redoutable grâce à quelques lignes de dialogues et une poignée de plans marquants (notamment lorsqu'on les découvre côte à côte sur la proue du navire). L'économie de moyens utilisée dans le scénario et la caractérisation des personnages contraste d'ailleurs de façon très heureuse avec la sophistication des mises à mort (on ne saurait parler de combats avec les forces en présence) et de la mise en scène.
Baby Cart 2 est donc une énorme réussite, qui ne peut que rendre impatient de découvrir la suite de l'errance sanglante d'Ogami Itto.