Presque deux films dictincts...
Quel embarras d'avoir à noter un film qui pourrait en contenir deux tant les parties sont différentes. D'un point de vue tout à fait personnel, subjectif, j'ai autant déprécier la première que j'ai aimé la seconde. Ainsi la première moitié n'aurait valu à elle-seule qu'un 6 (au mieux 7 mais j'en doute...) alors que la seconde se serait tournée vers le 9 avec facilité. J'ai choisi pour moyenne un 8, parce que, qu'on aime ou non, le tout est très bien et fait, parce que j'ai plus aimé la seconde moitié que je n'ai boudé la première, et que la deuxième étant deuxième, on finit sur la note positive (l'impression, pas le film !).
Première partie, l'histoire d'un jeune homme qui devient adulte, découvrant presque simultanément les joies de l'amour et de la guerre. Jeune homme insensé et assoiffé de vengeance, il ne m'est pas revenu, ce que j'ai du mal à comprendre puisqu'il m'était agréable dans Love Story. J'ai fait une intolérance au contexte de guerre, bien que n'ayant pas d'attirance particulière pour les batailles et l'aspect militaire de la chose, je pensais accrocher davantage. Très bien reconstitué, on sent le travail de détail, le travail d'un perfectionniste (décors, costumes...).
(On le sent et on le sait, ce grâce aux petites quinze minutes d'introduction de la soirée Il était une fois Barry Lyndon !)
En vérité, j'attendais de Kubrick qu'il m'émerveille, qu'il m'hypnotise. Je voulais trouver ça beau, je voulais ressentir des choses. Malheureusement il n'en fût rien. Ce spectacle m'a laissée froide, indifférente. Chaque minute un peu plus, je m'attristais d'être ainsi déçue par le grand Kubrick. Pas désagréable, mais film qui, s'il s'était arrêté à l'entracte ne m'aurait pas donné envie de le revoir.
J'ai retrouvé ce que j'attendais de Kubrick dans deux plans, deux merveilleux plans du ciel, l'un entourant le château, l'autre depuis la vitre de la calèche. Quand on est amoureux du ciel, on est amoureux de tous ceux qui savent rendre les caractéristiques qui font qu'il nous émerveille...
Dès la première apparition de Lady Lyndon, on comprend que les choses vont être désormais bien différentes, et que le film prend une autre tournure. Déjà parce que Marisa Berenson a un talent fou, elle semble hermétique, muette, mais son silence est un cri, un cri de détresse qui témoigne d'une douleur insoutenable. D'une beauté pure, et malgré tous ces apparats une beauté simple, cette actrice fait tout passer en semblant ne rien faire, c'est absolument merveilleux. Peu avant l'entracte, ce changement radical nous réconcilie avec l'histoire, et nous mène à avoir de grandes espérances, espérances qui elles ne seront pas déçues.
La situation diffère en même temps que la méthode. Drame familial au sein d'un seul et unique lieu, partie esthétiquement merveilleuse, plus lente, plus belle, plus prenante. Des plans merveilleux, sur les mains par exemple : des mains qui se serrent comme si ce geste leur permettait de mieux se comprendre et de rétablir ce qui entre eux a depuis longtemps disparu.. Et ces lents changements d'approche, de plus en plus loin, de plus en plus près. A tout moment, un arrêt sur image nous ferait croire à un tableau tant l'image semble fixe d'évoluer si lentement. Un seul exemple, la scène ou Lady Lyndon est dans son bain, scène d'une beauté rare.
De plus, Barry devient moins insupportable, peut-être parce qu'il a grandit, peut-être à cause de la perruque et du maquillage, peut-être parce qu'il est touchant de le voir empli d'un amour si intense et profond pour son fils.
Inutile de préciser qu'il est fait grand usage de la musique, principalement d'époque. Et ce dès le générique, grandiose, un peu à la 2001, qu'on aimerait voir durer plus longtemps tant la Sarabande de Haendel résonne avec force. Kubrick a un don, non seulement il sait comment se servir de la musique pour apporter à son image, mais il sait aussi et surtout lui donner toute sa force : autrement dit, la réciprocité est parfaite, l'image et la musique se mettent autant en valeur l'une que l'autre, elles semblent indissociables.
Tout au long du film (dans la première partie également, on ne peut que le reconnaitre !), il saura manier merveilleusement les sons, varier orchestration et tempo, ainsi sur le même thème changeront l'ambiance et l'atmosphère. La sarabande fera presque office d'une sorte de marche funèbre pendant les duels, emplissant l'espace avec gravité mais de façon grandiose.
Cela mérite d'être redit, encore et encore, la deuxième partie est une merveille, autant dans la réflexion que la réalisation, avec un coup de cœur pour l'esthétique, le rythme et l'intensité. Film à mon goût inégal donc, mais qui n'en reste pas moins une référence, un monument du cinéma. A voir absolument.