C'était un matin comme un autre, somme toute assez banal, un peu plus froid qu'à l'accoutumée peut-être. Pourtant, douce d'abord, puis de plus en plus aigüe, une rumeur, comme un souffle perfide, venait s'insinuer dans mon esprit susurrant une sentence définitive: "si tu n'as pas vu Ben- Hur à 50 ans tu auras raté ta vie".
Et effectivement parmi tous les grands classiques de l'âge d'or d'Hollywood qui avaient rythmé ma jeunesse, ne figurait pas Ben-Hur. Tant de moments d'émerveillement, souvent durant la période féérique de Noël, à découvrir ces monuments que sont Autant en emporte le vent, Les Dix commandements et bien d'autres encore, mais ce "Tale of the Christ", jamais.
Mais peut-on des années plus tard retrouver cet enchantement, cette innocence , bref n'est-il pas trop tard pour appréhender pour la première fois une telle œuvre ?
Eh bien, non, mille fois non ! Car Ben Hur est de ces films mythiques, magnifiés par le temps, c'est tout un morceau de vie que l'on traverse durant 3h30. Comment en effet, ne pas s'incliner avec le plus grand respect devant cette fresque monumentale qui demeure aujourd'hui encore l'une des œuvres les plus gigantesques de l'histoire du cinéma ?
Toute la démesure de l'âge d'or du cinéma hollywoodien accompagne ce grand classique : 15 000 figurants, 78 jours de tournage pour la course de char, utilisation du format 70 mm pour une plus grande résolution... Le résultat à l'écran est assez impressionnant, le soin apporté aux couleurs donne des scènes époustouflantes.On pense notamment à la parade du nouveau gouverneur, Valerius Gratus, dans Jérusalem au début du métrage, aux séquences filmées dans les galères, au défilé à Rome de Judah et Quintus Arius et bien évidemment à la course de char d'une très grande intensité; les cadrages jouent sur la profondeur, la verticalité pour appuyer cette idée de gigantisme.
Mais bien loin de n'être qu'une œuvre d'une rare beauté formelle, Ben-Hur c'est avant tout la force d'une évocation. Evocation biblique, (le film s'ouvre avec la naissance de Jésus et s'achève
avec sa crucifixion) """ ; évocation d'une révolte, celle du peuple de Judée; évocation d'une vengeance,
Judah n'aura de cesse d'obtenir réparation de l'injustice faite à sa famille""".
Ben Hur, c'est également, une épopée épique, abordant toutes les thématiques majeures de l'histoire de l'Humanité : la soumission des peuples opprimés, l'asservissement, l'odyssée des hommes révoltés, la dissonance entre la haine du prince de Judée et l'idée de pardon d'un Jésus que nous ne verrons jamais de face.
Pour autant, nous sommes loin du manichéisme, tous les romains n'ont pas l'immense soif de pouvoir de Messala, Quintus Arius en premier lieu qui fait de Judah son fils ou bien Sextus animé par cette pensée : "Comment peut-on lutter contre une idée ? Est-ce qu'on poignarde une idée ? En particulier une idée nouvelle?