Beaucoup apprécié la poésie qui s’émane de ce film, entre tumulte urbain, misère et violence, et calme de la ruralité et de la nature dans laquelle on peut s’évader et oublier quelques instants les soucis du quotidien. C’est le portrait d’une jeune fille à la recherche d’une échappatoire et d’un havre de paix au cœur des paysages charmants de la campagne anglaise, elle qui souhaite affirmer son identité et protéger ses proches tout en surmontant les difficultés de la vie et en grandissant.
Ce tableau pittoresque est dépeint à travers des techniques filmiques qui peuvent rebuter de prime abord – les séquences filmées au téléphone clashant avec l’esthétique polaroid et l’effet de grain pellicule – mais donnent finalement un certain cachet au film. On est immédiatement embarqué dans une atmosphère suspendue et nostalgique, mais aussi pleine de vie et d’énergie, appuyée par une bande son de grande qualité : Fontaines D.C., The Verve, Blur…
Mais l’ambiance est aussi marquée par une tension courant pendant tout le film, car la violence et l’agression peuvent surgir de nulle part et à tout instant dans le monde de Bailey. Dès le début de « Bird », on est amené à ressentir de la méfiance envers tous les personnages en raison de leur grande ambiguïté… je m’attendais même à détester la plupart d’entre eux.
Mais finalement, le film parvient à dépeindre avec beaucoup de justesse toute la complexité de ces personnages cabossés, tout en imperfections et en nuances de gris. En dehors de Skate (qui est une véritable ordure), tous les autres montrent des côtés plus positifs malgré leurs défauts et traumatismes. Tous sont capables d’amour, de compassion et même de tendresse, et le montrent à leur façon. Grâce à cela, au jeu très bon des acteurs (pas seulement celui de Barry Keoghan, mais plutôt en premier lieu celui des interprètes super convaincants de Bailey et Bird), et au fait que « Bird » prend le temps de nous montrer les personnages passer du temps ensemble et de dépeindre leur vie de tous les jours, on finit par s’attacher à eux, tous autant qu’ils sont. Bug et Kayleigh, toute la tribu de Hunter, la mère et les petits frères et sœurs de Bailey (sans oublier Dave)… et bien évidemment Bailey et Bird eux-mêmes. Deux êtres que rien ne prédestinait à se rencontrer, deux enfants meurtris par un passé traumatique, deux parias en quête de sens. Pour Bird, au début simple oiseau de passage, il s’agit de retrouver ses parents et de trouver une vraie famille. Pour Bailey, c’est redonner un sens à sa vie et arriver à s’accepter telle qu’elle est dans un corps et un esprit en plein tumulte adolescent. Tous deux finissent par s’adopter l’un l’autre et à se protéger et s’accepter mutuellement tels qu’ils sont.
Et comment parler de « Bird » et de ses deux personnages principaux sans évoquer la métaphore de l’oiseau qui survole constamment leur histoire ? Les oiseaux que Bailey filme et observe à travers l’écran de son téléphone pour pouvoir continuer de les regarder dans sa chambre la nuit tombée, tout comme le personnage de Bird qui arbore au fur et à mesure de plus en plus de similitudes avec ces véritables oiseaux (le film prenant alors un caractère de réalisme fantastique), sont autant de représentations de la liberté à laquelle la jeune fille aspire.
A la fin, Bailey s’accepte enfin pleinement telle qu’elle est, assumant sa féminité tout en affirmant son identité et son caractère unique, apportant son soutien à sa famille tout en confortant son indépendance… avec peut-être toujours le rêve de prendre son envol à son tour un jour où l’autre.