Cinquième film du réalisateur mexicain Alejandro Gonzales Iñarritu, troisième film tourné aux Etats-Unis, Birdman pourrait surprendre par sa forme, à première vue à l’antithèse de l’oeuvre du cinéaste. Tourné comme un faux plan séquence ce film est en réalité la suite logique d’instants interconnectés, de situations parallèles, souvent lointaines mais connexes dont Iñarritu a fait une base pour ses créations cinématographiques. Ici donc la volonté de supprimer les coupes implique une continuité dans laquelle chaque personnage évolue séparément jusqu’à l’instant où il rentre de nouveau dans le champs de la caméra, une technique qui ne contraste donc pas avec la narration habituelle du réalisateur mais qui se définit plutôt comme une mutation, une variation dans son travail.

Bien entendu l’utilisation du plan séquence ne doit pas se concevoir uniquement comme un joli défi technique, il y a un réel enjeu narratif qui consiste dans un premier temps à découvrir le monde de Riggan (Michael Keaton) en conservant au maximum son point de vue et dans un deuxième temps à mélanger le réel des coulisses avec le paraître de la scène, les personnages avec les acteurs. Ce dernier point étant une des intentions principales du film, Iñarritu allant même jusqu’à confondre la réalité du film à la réalité de son casting. La carrière de Riggan avec Birdman étant quasi-similaire à celle de Michael Keaton qui a interprété Batman fin des années 80, début des années 90. Dans le casting toujours, on peut noter la présence d’Edward Norton et d’Emma Stone qui ont également joué dans des films de super-héros, L’incroyable Hulk pour l’un, The Amazing Spiderman pour l’autre. Pourquoi cette obsession du super-héros, figure extrêmement récurrente dans cette oeuvre ? Parce que le genre supplante, par les recettes et le nombre d’entrées au cinéma le genre théâtral ou le cinéma dit d’auteur pour finir par l’écraser (vision d’ailleurs contestable) mais surtout parce que le super héros représente le dépassement de soi et se positionne à l’image de l’ambition de son sujet.

Dans son « dressing room », sorte de refuge pour Riggan où peuvent se déployer ses sentiments, se matérialise Birdman qui naturellement n’approuve pas la pièce que met en scène Riggan, la trouvant trop dégradante pour un homme de son envergure. L’apparition de Birdman nous montre à quel point l’ego du personnage joué par Michael Keaton peut être torturé au point de dissocier la réalité du fictionnel. Le film navigue dans cette dualité où Riggan doit se dissocier de Birdman en jouant le vrai Riggan dans la pièce, en restant fidèle à lui même (fait qu’il n’arrivera à combler qu’en fin de film) alors que Mike Shiner (Edward Norton) est son parfait contraire, il joue dans la vie mais vit réellement lorsqu’il joue une pièce de théâtre.

La suite ici : https://lecinemadughetto.wordpress.com/2015/02/01/birdman-2015/
Adrien_Dal_Bello
7

Créée

le 1 févr. 2015

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