Avant-première très rude au Festival d'Alès : de nombreux spectateurs s'agacent de "venir voir un documentaire sur la disparition des oiseaux, sans voir un seul oiseau vivant !", mais sérieusement : n'ont-ils pas saisi ? Le parti-pris de Jacques Loeuille est à double-tranchant : ou bien le spectateur est capable de saisir que l'agacement qu'il ressent est un coup de poing volontaire (un signal d'alarme : si vous ne voulez pas que cette heure passée à regarder des dessins d'oiseaux disparus soit pérenne, il faut qu'on change, sinon on n'aura effectivement plus de des reproductions à regarder, pour toujours...), ou bien il ressortira de la salle en voulant zapper sur Discovery et retrouver ses docus piaillant gaiment, qui seront peut-être les archives de demain... Jacques Loeuille joue un jeu dangereux, et si pour notre part on a adoré s'énerver de l'absence des oiseaux, pour la bonne cause, d'autres passeront sans forcer à côté du sujet (dommage), tandis que Birds of America nous fait découvrir l'urgence de la protection des oiseaux. Les dessins de Audubon sont assez méconnus en France (on n'en avait jamais entendu parler), aussi on apprend tout l'art du dessinateur dans la représentation de la faune, son esthétisme particulier qui a fait crier au scandale les naturalistes de l'époque, ses méthodes pour observer les oiseaux, son parcours à travers l'Amérique à la recherche des espèces, une boulimie de représentations des volatiles qu'on cerne peu à peu dans le documentaire. On aura tout de même quelques oiseaux vivants à voir succinctement, ceux des zoos dont les ailes sont coupées, rendus fous par les bruits du publics et par l'incapacité de voler librement, mais sont-ce encore des vrais "oiseaux" ?... Le réalisateur nous a donné sa réponse, qu'on connaissait avant même de poser la question. Avec son immense message écologique et son amour pour l'art de Audubon, le film de Jacques Loeuille a de la ressource, encore faut-il avoir envie d'entendre l'assourdissant signal d'alarme.

Aude_L
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs documentaires, Festival d'Alès Itinérances 2022 et Meilleurs films 2022

Créée

le 11 avr. 2022

Critique lue 404 fois

6 j'aime

Aude_L

Écrit par

Critique lue 404 fois

6

D'autres avis sur Birds of America

Birds of America
Z0DIEVS
8

"L'Amérique a tourné le dos à ses oiseaux"

J'avais le sourire aux lèvres quand je suis arrivé dans ma salle pour voir Birds of America, une petite queue s'était organiser pour aller voir le troisième Jurassic World alors que l'espace était...

le 11 juin 2022

3 j'aime

7

Birds of America
lechesnebaptiste
3

Les oiseaux du bavardage

Si Birds of America s'avère intéressant dans son contenu, il l’est beaucoup moins dans sa forme, complètement conventionnelle et académique vis-à-vis des documentaires télévisuels. Le film s’avère...

le 21 févr. 2023

1 j'aime

Birds of America
Polouchska
8

Critique de Birds of America par Polouchska

Récit en voix off le long du fleuve Mississippi, le réalisateur Jacques Loeuille nous offre une autre vision de l'Amérique. Celle du début du XIXème siècle où l'on pouvait encore voir dans le ciel...

le 19 avr. 2023

1 j'aime

3

Du même critique

The French Dispatch
Aude_L
7

Un tapis rouge démentiel

Un Wes Anderson qui reste égal à l'inventivité folle, au casting hallucinatoire et à l'esthétique (comme toujours) brillante de son auteur, mais qui, on l'avoue, restera certainement mineur dans sa...

le 29 juil. 2021

49 j'aime

Mulholland Drive
Aude_L
5

Tout le monde adore...sauf moi (snif).

Certes, David Lynch a un style bien à lui et reconnaissable entre mille, mais il faut l'aimer, si l'on veut s'extasier devant Mullholland Drive. Subjectivement, on n'y a rien compris, si ce n'est...

le 9 oct. 2021

41 j'aime

Dogman
Aude_L
8

Besson a lâché les chiens !

Caleb Landry Jones est vraiment stupéfiant, nous ayant tour à tour fait peur, pitié, pleurer (l'interprétation d’Édith Piaf en clair-obscur, transcendée, avec un montage si passionné, on ne pouvait...

le 18 sept. 2023

40 j'aime